Uncharted
Avec six films à son actif en vingt-deux ans de carrière, James Gray est un réalisateur qui sait se faire désirer. Dans The Lost City of Z, Gray abandonne la jungle New-Yorkaise qu’il connaît si bien...
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Pendant près de trente minutes, The Last City of Z s’offre au spectateur comme un vaste vestiaire où déposer ses présupposés et la conception de l’aventure que des représentations aujourd’hui érigées au rang de références – on pense ici à Indiana Jones, pour n’en citer que les meilleures – ont codifiée ; trente minutes où nous subissons, à l’instar des protagonistes principaux, la lourdeur du cérémonial aristocratique, enlisé dans ses procédures, ses us et coutumes, où le temps passe lentement. Et puis quelque chose se produit : les explorateurs entament leur marche vers ce lieu magique où le fleuve prend sa source, semblent se raccorder à leur nature première au point de ne plus pouvoir prétendre vivre sans elle (tel est le cas, du moins, pour Fawcett). Dès lors, The Last City of Z construit, avec une subtilité remarquable, la puissance d’attraction qu’exerce la jungle bolivienne sur l’esprit du cartographe et déjoue ainsi toutes les étapes obligées du film de conquête en les sublimant par la prégnance du mystère. La découverte des peuples s’écarte vite des sentiers si souvent empruntés par les ethnologues pour préférer assister à la naissance de la magie : une mixture dans la rivière et voilà les poissons remontés à la surface, des éclats de poteries retrouvés dans la terre, des effigies d’un culte ancestral logées dans des arbres. Le film oppose magistralement cérémonial et cérémonie, faisant du premier l’apanage d’une société dépourvu de surnature et du second la restauration de la magie inhérente à l’existence de l’homme dans la nature (ces lumières dans la nuit font revivre aux explorateurs la tragédie de la nature). Le film oppose magistralement cannibalisme ritualisé et boucherie militaire à échelle mondiale, et expose les dangers de l’exploration à plus ample échelle (et militarisée) des terres réputées indigènes. L’entreprise scientifique se transforme, dans The Last City of Z, en cartographie de l’intériorité sensible de l’être humain : le principe est de descendre toujours plus profondément dans cette jungle devenue entre-temps métaphore de l’inconscient. Et cette boussole renvoyée traduit la communion de l’homme avec sa nature intérieure retrouvée après tant d’efforts, preuve qu’il est désormais chez lui et ne se perdra plus jamais. Une œuvre brillante et ambitieuse qui, malgré quelques lourdeurs initiales, nous plonge dans la rêverie moite et obsessionnelle de Percy Fawcett tout en conviant chaque spectateur à reproduire cette descente en soi pour retrouver sa jungle perdue.
Créée
le 31 mai 2019
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