Au pays du non-dit...


Rover commence bien, avec une atmosphère particulière, la promesse d'un film sombre et âpre. Force est de constater que le cadre reste maîtrisé de bout en bout. Le film se laisse voir sans réel déplaisir. Mais l'on peut se demander s'il n'aurait pas été considéré comme une simple série B indépendante, de facture correcte en dépit d'un scénario scandaleusement sans intérêt, s'il n'avait pas été porté par les performances de Guy Pearce, et surtout de Robert Pattinson.


Les deux acteurs principaux sont bons. Et surtout, ils sont appréciés dans ce genre de rôles à contre-emploi. Ils sont sans doute LA raison du semi-succès critique du métrage.


Pour le reste, le film n'apporte malheureusement rien. Le réalisateur s'est targué dans une interview d'avoir fait quelque chose de plus radical et glaçant que Mad Max ("avec tout le respect qu'il a pour ce film"). Une déclaration prétentieuse pour un quelqu'un qui livre une mise en scène paresseuse, des dialogues clichés, et un scénario inexistant (à la mode des films indépendants, comme Blue Ruin).


On a donc droit à un énième film post-apocalyptique nihiliste, avec un énième anti-héros mutique, à qui il faut poser 4 fois une question pour espérer obtenir une réponse (le genre de héros qui montre à quel point les personnages secondaires font plus souvent qu'à leur tour preuve d'une patience angélique), mais bon, l'homme doit avoir un lourd passé, et des failles, donc on est censé tolérer le cliché sur pattes, surtout qu'il est accompagné d'un type un peu idiot et borné, à qui il faut poser 4 fois une question pour espérer... bref, la même chose.
Et quand les personnages n'obtiennent pas de réponse, ils se disent que ce n'est pas grave et regardent l'horizon. Après tout, ils sont dans un film. Gargarisons-nous d'être des archétypes, doivent-ils se dire, puisque le cinéma nous offre cette chance unique.


La bande-originale tente d'apporter un peu d'originalité, entre partition atmosphérique sur fond de paysages australiens désertiques filmés au ralenti, et play-list YouTube lue en random, pour offrir un décalage improbable (et rarement heureux) sur les scènes de transition.


Ces scènes de transition, d'ailleurs, ne relient pas grand-chose. Un homme se fait voler sa voiture et veut la récupérer. Sur le chemin, il va de péripétie en péripétie, croisant des personnages loin d'être inoubliables (sauf le nain... parce que c'est un nain), chaque scène servant sans doute à montrer à quel point on vit dans un monde désespéré. On dit que le meilleur scénario tient parfois sur un ticket de métro, mais il ne faut peut-être pas prendre ce genre d'expression au pied de la lettre. D'ailleurs, peut-être qu'on ne dit même pas ça.


En tout cas, là, nul scénar, et malgré la qualité de leur prestation, il n'y a aucune alchimie entre les deux personnages principaux. Et comme aucun n'est véritablement attachant ("never go full retard" https://www.youtube.com/watch?v=oAKG-kbKeIo), le spectateur manque en plus d'une véritable accroche pour au moins créer un lien émotionnel. De ce fait, après quelques scènes où la mort survient soudainement et nous garde éveillé, on en vient très vite à se désintéresser du dénouement prévisible d'une histoire sans enjeu.


il y avait de quoi faire beaucoup mieux. Mais quand prétentieux rime avec paresseux, on n'obtient quelque chose de creux.
Tant d'argent dépensé pour si peu.

ycatlow
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le 18 mai 2016

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ycatlow

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