De la comédie romantique ni vraiment drôle ni vraiment romantique pour faire plus vrai, pour faire plus désespéré: c'est à croire que le cinéma n'a toujours pas digéré The Virgin Suicides bientôt quinze ans après (merde, même moi ça ne me rajeunit pas) et qu'on en est encore à découvrir que oui, la souffrance avant la majorité, c'est physiquement et chimiquement possible. Que The Spectacular Now s'inscrive dans ce créneau n'est donc évidemment pas gage d'originalité, et la bobine nous conte en gros l'histoire d'un mauvais garçon populaire et alcoolique qui se transforme petit à petit au contact d'une petite pouilleuse simplette de son lycée de campagne. Je sais, ça peut paraître un peu cruel formulé comme ça, mais j'insiste sur le qualificatif de petite pouilleuse simplette; parce que si Sutter (c'est le nom du mec) se découvre un coeur plein de bibine grâce à Aimée (ça, c'est le nom de la nana), elle, par contre, se transforme peu à peu en CONNE DÉCÉRÉBRÉE DOTÉE DU LIBRE ARBITRE D'UNE MOULE. Je ne peux pas ne pas spoiler à ce stade, alors si tu n'as pas vu The Spectacular Now, je te conseille de fuir sur une autre critique, mais juste, HELL NO, la fille se fait littéralement pousser sous les roues d'une voiture et deux jours après elle a le smile jusqu'aux oreilles et elle roule des grosses pelles au mec qui a failli la tuer A DEUX REPRISES. Lui-même semble d'ailleurs l'espace d'un instant s'interroger sur la santé mentale de sa meuf. Je pense personnellement qu'il fait bien, parce qu'à ce degré de dévouement, la jolie soumise menace quand même de se métamorphoser à tout moment en Anastasia Steele et de réclamer des coups de massue cloutée sur les parties génitales.
Et puis il y a aussi de la grosse ironie tragique, puisque qu'on a, pour la deuxième fois après Rabbit Hole, Miles Teller dans le rôle d'un véritable danger sur quatre roues. Pour un mec qui a failli mourir dans un accident de voiture (et qui en tire quelques impressionnantes cicatrices), ça fait quand même beaucoup de malheureuses coïncidences. Ou alors c'est peut-être juste une thérapie de choc. Notons d'ailleurs que s'il fait un excellent alcoolique et un très bon imbécile, l'acteur est moyennement crédible dans son rôle de bellâtre populaire, tout comme Shailene Woodley dans son rôle de jeune fille dévouée toute en retenue. Je veux dire, que ce soit en vrai ou dans le film, elle porte quand même le nom d'une gogo danseuse, et non pas que je sois pour la détermination sociale, mais à ce niveau de naïveté christique, je sais pas, Mary aurait parfaitement convenu. Mais je divague, d'autant plus qu'au final, le casting porte tout de même le film, qui lui, est simplement mais très efficacement mis en images par James Ponsoldt, à quelques déconvenues dans la prise de son près. La délicatesse globale de la mise en scène, portée par quelques choix presque naturalistes (comme l'absence de maquillage), infuse d'ailleurs une tension qui réussit particulièrement bien au long-métrage: dans certains de ses retranchements, The Spectacular Now sait se montrer relativement intense et sombre, sans jamais tomber trop dramatiquement dans l'hystérie ou le cynisme. Il n'empêche que ses gros sabots s'entendent de loin, et que le manque de finesse globale du traitement de certains thèmes (dont les fameux "moment présents" que le titre souligne) est particulièrement préjudiciable au résultat. Entre représentation relativement niaise de l'amour et noirceur de posture, The Spectacular Now n'est au final en rien différent de ce qui nous arrive tous les ans de fausses comédies mais de vrais mélodrames en mode mineur. Un quasi film de (nouveau) genre, que les amateurs et les nostalgiques apprécieront sans doute, et qui ne tuera de toute façon personne - mais qui ne vous rendra pas les 100 minutes qu'il vous a pris. Vous êtes prévenus.