Le dispositif mis en place par Jean-Pascal Zadi et John Wax a l’intelligence de prétendre se tenir écarté du cinéma – l’amateurisme est revendiqué d’entrée de jeu par l’humoriste et les perturbations de son discours – pour mieux donner vie au cinéma par quelques séquences très réussies, à mi-chemin entre l’improvisation et le jeu d’acteurs ; et ce travail de refus du cinéma pour accéder au cinéma se retrouve dans la manière qu’a le film d’aborder le racisme contemporain, feignant de prime abord la dénonciation agressive et sans concession dudit racisme pour mieux atteindre ses racines profondes, pour mieux appuyer là où ça fait mal et soulever les paradoxes d’une pensée contestatrice trop simpliste.
Tout Simplement noir constitue donc une brillante tribune politique, quoique répétitive par moments, qui fonce tête baissée dans les travers attendus afin de les détricoter consciemment et soigneusement, à l’instar de Voltaire dans ses contes, construisant un personnage candide (tellement engagé dans sa cause qu’il développe une forme de candeur) pour amener les travers de la société à se dévoiler d’eux-mêmes, comme par réaction à une innocence première et impossible.
Le souci, c’est que le retournement dramatique, qui fait basculer à terme l’humour dans la gravité, ne réussit pas vraiment à stopper net le crescendo burlesque, de telle sorte que nous ne comprenons pas si le plaquage au sol, la projection de gaz, la violence subie s’insèrent dans le dispositif comique comme un point de non-retour au-delà duquel rire n’est plus possible, ou si tout cela perce la bulle candide pour raccorder notre antihéros à la réalité. Il y a dans cette clausule une impression de facticité et de facilité alors même qu’elle aurait dû signifier le retour à la réalité la plus terrible après une série de sketchs fort drôles. On se dit que c’est forcé, que ça tombe en deus ex machina, justifié par la seule forme du faux documentaire au cours duquel tout peut arriver. Reste une comédie futée et hilarante.