Déchirant
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Tavernier, conscient de son talent et de ses limites créatives, des éloges comme des critiques qui peuvent lui être adressés, met intelligemment en abyme son travail à travers le personnage de Ladmiral, peintre à la fois admiré et envié par son fils aîné et critiqué par sa fille cadette, on ne peut plus académique, d’une inventivité mesurée, fidèle aux courants artistiques passés, peignant sur des thèmes triviaux sans vraiment y apporter de touche personnelle, suscitant l’ennui, créant une impression de vide et d’inutilité, portant cependant un soin considérable à la mise en scène de ses tableaux, à la disposition dans l’espace, au mouvement, à la beauté, soit-elle surannée.
Le principal est dit.
Sinon, un dimanche à la campagne, ce sont deux films en un : le premier, cherchant un sens, avec une caméra aux mouvements aussi amples et travaillés que vains et vides de significations, pourvu de dialogues creux, de scènes assez maladroitement écrites malgré les bonnes intentions, de personnages secondaires sans relief, d’idées simplettes ne méritant guère d’être redites, le tout provoquant un ennui tenace ; puis le deuxième, avec l’arrivée de la fille qui apporte une fraîcheur appréciable quoique trop artificielle, mue par un élan moderne et des idées nouvelles, grâce à qui nous aurons la plus belle scène du film dans cette guinguette fin de siècle des bords de Seine que nous a décrit Zola dans l’Assommoir ou Renoir dans le déjeuner des canotiers.
Le tout parsemé des citations littéraires du roman de Pierre Bost, Monsieur Ladmiral va bientôt mourir, dont le film est une adaptation, citations qui sonnent bien mais ne collent pas au prosaïsme des personnages et de leurs dialogues, et de quelques analepses (souvenir de la défunte) ainsi que d’une prolepse (mort du patriarche) pertinentes et bienvenues.
En faisant dialoguer passé et présent, révérence aux canons et recherche formelle, Tavernier réussit tant bien que mal l’éternelle dialectique entre tradition et modernité, lui qui se serait vu soufflé par John Huston en personne « Great kid ! Je suis fier de toi… ».
6.5/10
Créée
le 19 mai 2021
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