Chez Berri, les filles avaient leur monde, les pères avaient le leur. Ce qui ne les empêchait pas d’exister autrement que par le prisme vulgaire de leur époque. Les deux ados chez Richet sont deux ados insupportables, débiles, deux pétasses bien d’aujourd’hui en somme, issues de la culture selfie et texto. Elles sont vulgaires quand elles parlent, quand elles dansent, quand elles draguent. Clichés en puissance. Quel intérêt d’écrire si mal des personnages ?


 Encore un de ces films de droite qui veut paraître cool, où l’on se plaint vite fait des indépendantistes corses et se moquent des vieux chasseurs racistes et vendeurs bricolage misogynes. On garde les vieilles chaises et les toiles cirées mais on fait du canyoning, du jet-ski et on roule en Audi. On balance Follow rivers de Likke Li et Diamonds de Rihanna, pour faire comme Kechiche et Sciamma. Ou Les mots de Christophe, pour donner un semblant de profondeur. Cool on t’a dit.
Ce qu’il faut retenir : En bon pote de Canet (hypothèse) et donc aussi de Langmann, les types se font de savoureux clins d’œil de beaufs. Ici, Cluzet ne chasse plus les fouines mais les sangliers (afin de placer une grosse pub Gamm Vert). Mais il le fait avec la même verve et les mêmes grimaces hénaurmes qui faisaient le fil rouge des Petits mouchoirs. Et puis Cluzet doit faire corse alors il trimbale un lamentable accent forcé, seulement quand il y pense, c’est à se tordre, parmi un nombre incalculable de séquences nullissimes à l’image du caleçon de Vincent Cassel.
Le plus troublant là-dedans c’est de se dire que le réalisateur de cet étron est le même que celui de Ma 6-T va crack-er. Comment, en vingt ans, en arriver là ? Déjà qu’un hommage (assez mauvais, au passage) à Assaut de Carpenter il y a dix ans marquait une évolution de la renonciation. Mais là ? L’hommage à Berri (le pauvre, avait-il mérité ça ? Et dire que son fils même est derrière tout ça…) c’était déjà improbable (de la part de Richet, je veux dire) mais le faire ainsi c’est à désespérer.
Dans Les Cahiers, Malausa disait ceci : « Voir Richet, l’ex-ouvrier travaillé par les grandes formes révolutionnaires, s’abaisser à filmer les cabotinages d’acteurs aussi sociologiquement formatés que Cassel – le papa cool qui sort en boite – ou Cluzet – le papounet ronchon qui reste à la maison – n’est pas seulement consternant : C’est la marque d’une soumission insupportable à l’entreprise de restauration qui travaille l’époque. Un moment d’égarement ne tente rien d’autre que de nous vendre cette idée parfaitement malsaine que, dans un monde à la jeunesse résignée, les papas ont la santé ». Je plussoie sur tout.
JanosValuska
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le 4 févr. 2016

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