Voyage au bout de l'enfer par Melvin Zed

Revu hier soir et décidemment, je n'aime vraiment pas ce film. Je n'aime pas son montage interminable étalant de manière prétentieuse des scènes anodines, pensant que la dilatation de l'action leur donnera un sens... Je n'aime pas non plus sa photo, ni sa lumière (la scène de mariage, baignant dans une clarté globale qui n'offre aucune profondeur et écrase tout) ou oscillant entre une lumière très naturelle et des éclairages grossiers (la partie de chasse), ses cadres, à part un ou deux plans, ne me provoquent rien, à part un ennui poli. A mes yeux, l'image n'est jamais passionnante, elle ne raconte pas grand chose et les cadres très souvent quelconques.
Je déteste ses dialogues, qui ne racontent souvent jamais rien et ne sont jamais mémorables, donnant la désagréable impression que le film est continuellement improvisé par des gens qui ne savent pas quoi dire.
Le nombre de scènes où les persos répètent les mêmes phrases insignifiantes en boucle m'enfonce la tête dans la consternation et l'ennui. Beaucoup d'impros (surtout au début, entre potes mais tout du long on a des scènes disons, gênantes) sonnent forcées et n'offrent rien d'intéressant, avec toujours cette volonté prétentieuse d'afficher des scènes anormalement longues qui ne racontent rien du tout (il y en a un sacré paquet, mais là je pense à la blague du gars laissé sur le bord de la route), je n'aime pas non plus cette façon un peu suffisante de prétendre que le film parle de l'Amérique, par ce côté forcé "steel workers" auquel je n'arrive jamais à croire, par cette ville à laquelle je ne crois pas non plus (et qui n'existe que par quelques plans édifiants - les usines en fond, les cheminées... - qui se répètent continuellement), à ce mariage qui pousse le film à se mesurer au Parrain (et qui me pose problème, un mariage si dispendieux pour ces prolos qui vivent dans des mobile homes ?) Je n'aime pas non plus la courte représentation du Vietnam, complètement fantaisiste, ce combat où un village est à la fois bombardé par les ricains parce qu'il est occupé par les VC, et à la fois sert de décors aux exactions d'un soldat du Nord Vietnam qui va tuer des civils à la grenade (ou comment refaire My Lai à l'envers). Toutes les scènes de ce village refoulent la reconstitution abracadabrantesque... Le coup du lance flammes, sérieux... Les scènes lorsqu'ils sont prisonniers sonnent aussi très faux à mes yeux & oreilles, un montage parfois vraiment cheulou (surtout lorsque Steven commence à débloquer, il regarde devant lui, contre champ avec le visage de De Niro, puis Deniro le rejoint dans le plan montrant qu'ils n’étaient pas face à face mais à côté l'un de l'autre)...
Pour le reste, le retour à la maison et le côté "je suis traumatisé je peux pas parler tout ça" a pour moi été bien bien mieux montré dans d'autres films, comme Coming Home ou Rolling Thunder (sur ce point précis).
Reste la fin, sorte de grosse métaphore un peu lourdaude sur la Guerre qui choisi ses victimes au hasard. Un s'en sort, l'autre est handicapé et le dernier devient fou. OK. Le final God Bless America (au delà de l'horreur musicale qu'il représente) tentant de bien te faire rentrer l'idée à coups de pieds dans le cul, au bout de 3 heures interminables, que c'est un film sur l'Amérique et les Américains...
Donc voila, j'ai vraiment un souci avec ce film. Je trouve que c'est minable, indigent, quant à ce que ça à a raconter sur l'Amérique, la faute à une mise en scène ampoulée, lourdaude, prétentieuse, et à cause d'un script trop maigre, porté par des dialogues nullissimes* et une dilatation vide de sens. Cette Amérique, c'est pourtant le cœur du film, ce qui devrait être traité, étant donné que le Vietnam reste un décor (comme tout le reste en fait mais bon) et que son traitement est tellement fantaisiste qu'il ne peut, à aucun moment, prétendre être un commentaire sur la guerre. (Là dessus j'ai pas de problème, pourquoi pas, même si ça me fait un peu mal au cul de lire un peu partout "grand film sur la guerre du VN" ou "meilleur film sur la guerre du VN...)
J'ai pas parlé de la zik du film, mais je pense que j'en ai déjà dit assez de mal...
J'ai vraiment un problème avec ce "classique", j'arrive pas à y voir autre chose qu'une purge boursoufflée, filmée sans génie, montée en dépit du bon sens, reposant sur un scénario vide et UNE astuce, UNE seule... Le film n'existe que pour ce concept : L'idée est venue du jeu de la roulette russe et s'est construit entièrement autour. Un premier scénario sur ce sujet, racheté, on change toute l'histoire car un type s'est dit "nan mais ça ferait pas une bonne métaphore du VN ça ? Et voila... tout est construit autour à l'arrache et c'est tout, le reste c'est soit traité sans aucune rigueur (le coté steelworker) soit des idées concepts puant le boulshitage à plein nez, ne signifiant rien, mais apparaissant comme "trop profond" (tout le truc "one shot"... et la nature du perso de DeNiro, le parallèle chasse / guerre)
Bref, il fallait que je le revoie, j'ai pas été déçu. Trois heures d'ennui et de facepalm.
En tous cas, il existe des films sur le Vietnam nettement plus intéressants que ça. Notamment à cette époque où le conflit fut d'abord appréhendé par l'impact de la guerre eu sur les gens et les communautés... Coming Home, par exemple, même avec son coté un peu cucul de faire en 1978 une déclaration vibrante contre la Guerre du Vietnam me semble tellement plus riche et plus complexe... (et même si c'est une rom com ricaine loin d'être exceptionnelle, je le trouve mieux foutu, mieux joué, tellement mieux dialogué - ça c'est pas dur - et emballé que ce film dont le dispositif et l'ambition classe automatiquement à une place, pour moi, totalement usurpée...

*Ca faisait 15 ans au moins que je l'avais pas vu, à un moment je me suis dit, nan mais attends, cette incapacité totale qu'ont les gens à formuler des phrases, à parler, ces morceaux de phrases répétés en boucle, dans tant de scènes, c'est pas possible, ça doit être pensé ainsi, c'est un des thèmes du film : l'incapacité qu'on les gens à pouvoir communiquer, à parler et faire de simple phrases... Et puis plus le film avance, plus je me dis "nan, c'est juste naze en fait..."