En 1983,Tami Oldham,une californienne de 23 ans qui voyage au gré des opportunités qui se présentent,séjourne à Tahiti où elle rencontre Richard Sharp,un beau navigateur anglais de dix ans son aîné qui lui aussi se balade à travers le Monde en suivant ses envies et les jobs qu'il décroche.Les jeunes gens tombent éperdument amoureux et,pour financer le tour du Monde dont ils rêvent,ils acceptent de convoyer un voilier jusqu'à San Diego,qui est précisément la ville d'origine de Tami.Manque de chance,ils se trouvent pris en plein Océan Pacifique dans le dévastateur ouragan Raymond,qui laisse leur bateau en piteux état et quasiment indirigeable,tandis qu'eux sont sérieusement blessés,surtout Richard qui avec une jambe brisée et des côtes enfoncées ne peut plus bouger et doit laisser sa compagne accomplir toutes les manoeuvres et autres obligations nécessaires à leur survie.Ils dériveront ainsi durant 41 jours avant d'atteindre une côte.L'islandais Baltasar Kormakur,ancien acteur devenu réalisateur menant une carrière internationale,adapte là un livre de Tami Oldham relatant sa propre histoire vraie.Il y a pas mal de défauts dans ce film au rythme incertain qui traîne beaucoup,surtout dans sa phase de présentation peu passionnante,ce qui est aggravé par l'usage continuel de va-et-viens entre la période de rencontre des tourtereaux et celle de leur naufrage.D'autant que les personnages apparaissent comme assez fades.Ce sont des jeunes qui ont tourné le dos à la société pour vivre une existence marginale aventureuse faite de longs voyages en mer et de découverte de pays lointains et exotiques,un peu comme les braqueurs-surfeurs de "Point Break" suivaient la vague."C'est pas l'homme qui prend la mer,c'est la mer qui prend l'homme",comme dit Renaud.Mais on saura que tous deux ont "rompu les amarres" avec leurs milieux pour des raisons identiques liées à des drames familiaux.L'indolence de la partie tahitienne,avec son romantisme un peu....bateau,est regrettable dans la mesure où les scènes de naufrage sont très spectaculaires.Nos marins perdus se retrouvent absolument seuls au centre de zones gigantesques où il ne passe presque jamais personne,ce qui occasionne de magnifiques images dues au grand Robert Richardson,tandis que Kormakur gère bien et parvient à insuffler un grand réalisme au calvaire vécu par les protagonistes,se montrant bien supérieur sur ce plan au très surestimé "All is lost" de J.C. Chandor,film de 2013 traitant d'un sujet similaire.Les voiles et le gouvernail sont à moitié HS,la radio ne fonctionne plus,il y a de la flotte plein la cale,ils ne savent plus trop où ils sont,ce qui n'arrange pas les choix de trajectoires, et les réserves alimentaires sont insuffisantes compte-tenu du prolongement de leur dérive.C'est là que Tami va faire montre de ressources incroyables et se conduire comme une véritable super-héroïne.Devant suppléer à Richard devenu un poids mort,elle est seule pour calculer les routes à prendre,alors que c'est lui le navigateur,pour réparer ce qui est réparable,pour colmater les brèches,pour gérer la nourriture,alors qu'elle est entamée par quelques blessures et qu'au fil du temps la déshydratation et la sous-alimentation l'affaiblissent inexorablement.En plus,elle est végétarienne et n'a plus d'autre option que de consommer les conserves de viande ou de pêcher des poissons.Cette guerrière admirable tiendra on ne sait comment plus d'un mois dans ces conditions dantesques,avec au bout une délivrance au goût amer.La toujours performante et athlétique Shailene Woodley,également co-productrice du film,est carrément sublime dans ce rôle auquel elle se donne corps et âme,dommage que son partenaire Sam Claflin soit aussi transparent.Il est à noter que les comédiens sont une californienne et un anglais,exactement comme leurs personnages.L'oeuvre pourrait passer pour gentiment médiocre si ne survenait à la fin un twist époustouflant et déchirant rappelant celui de "L'Odyssée de Pi" qui rattrape largement les choses et révèle la réelle substance d'un film traitant finalement de l'amour fou et de la perte irréparable de l'être cher.La vraie Tami apparait à la fin,voguant sur son bateau car,nous dit-on,elle n'a jamais cessé de naviguer.Après ce qui lui est arrivé,on pourrait se dire que cette fille est folle mais au fond on la comprend.C'est sa façon à elle de poursuivre son histoire d'amour et sans doute continue-t-elle,seule au milieu de l'océan,à voir Richard sur le pont et à lui parler.