Même si Frédéric Videau s'en défend (par un avertissement préalable), son film s'inspire librement de l'histoire de Natascha Kampusch séquestrée en Autriche de 1998 à 2006. Le réalisateur fait le choix de partager son récit entre la nouvelle vie d'une ado étrangère au nouveau monde qui l'entoure et l'histoire de sa captivité. Choix discutable car le principal reproche que l'on pourrait faire au film est justement cette indécision. Frédéric Videau veut « trop en dire » et finalement laisse un peu le spectateur sur sa faim.
Ce sont les seules ombres au tableau car le film de Videau s'avère être particulièrement réussi. Se dégage en effet de ce film une relative pudeur car il prend le parti de ne jamais juger l'acte de séquestration sans pour autant l'excuser. Le récit est bouleversant par la mise en place d'une complicité entre la captive et son gêolier. Ce qui d'habitude pourrait être interprété par un acte de barbarie (en témoigne les réactions de la mère de Gaëlle : « je veux qu'il crève ! ») est ici présenté avec beaucoup d'humanité. Le spectateur en oublierait presque parfois que Gaëlle est une proie, il y a ici l'intégration d'une certaine normalité dans des rapports qui sont supposés être justement extraordinaires.
Voila pour le côté pompeux du truc. Hormis ça Reda Kateb (Vincent) est monstrueux ! Je l'avais découvert dans Engrenages, jouant un caid de cité extrêmement agaçant, gavant même (il avait aussi un petit rôle dans Un prophète). Ici c'est l'inverse. Tout en retenue, en justesse, il est juste parfait, te collant une bonne claque de jeu dans ta face ! De l'autre côté, Agathe Bonitzer (Gaëlle) s'en sort plus que bien avec un rôle complexe intégrant l'avant et l'après captivité. Pas facile.
Frédéric Videau signe ici un film touchant. Il saisit parfaitement la tension et la complexité de la relation entre les deux personnages principaux. Seul petit bémol donc, la dispersion entre deux sujets qui auraient chacun mérité 1h30 de pellicule. La carrière des deux comédiens Reda Kateb et Agathe Bonitzer est à suivre car il est incontestable qu'ils possèdent un énorme talent.
hugoricoult
8
Écrit par

Créée

le 4 mai 2012

Critique lue 463 fois

hugoricoult

Écrit par

Critique lue 463 fois

D'autres avis sur À moi seule

À moi seule
PatrickBraganti
9

Critique de À moi seule par Patrick Braganti

L'Autriche a été dernièrement le territoire de deux faits divers sordides et terribles qui, lorsqu'ils furent révélés, ébranlèrent tout le pays et connurent même un retentissement au-delà des...

le 3 avr. 2012

14 j'aime

2

À moi seule
eloch
8

Page blanche

Sur nos faits divers (le point de départ est le retour, après des années de captivité, de l'autrichienne Natascha Kampusch) les agissements des autres (l'homme qui a kidnappé), ce qui se passe au...

le 22 déc. 2014

7 j'aime

À moi seule
matashi
7

Critique de À moi seule par Lenny Landau

Très joli film sur un sujet pourtant difficile et souvent traité sans aucune subtilité. Ici Frédérique Videau nous propose deux personnages aux relations complexes ; à la fois violence et tendresse...

le 25 févr. 2012

6 j'aime

2

Du même critique

Tyrannosaur
hugoricoult
9

Critique de Tyrannosaur par hugoricoult

Le film de Paddy Considine est un uppercut. Mieux, un combo Coup de tête-balayette-manchette pourrait être la définition appropriée du film. C'est d'abord une histoire de chien, auquel son maître...

le 4 mai 2012

2 j'aime

Spring Breakers
hugoricoult
2

Critique de Spring Breakers par hugoricoult

Allo... non mais... J'vais pas la faire mais Spring Breakers et Harmony Korine le mériteraient bien tant le film est au niveau de ce qu'il reste de neurones à l'autre là, vous savez.. oui oui...

le 21 mars 2013

1 j'aime

De rouille et d'os
hugoricoult
9

Critique de De rouille et d'os par hugoricoult

De rouille et d'os est le 6ème film de Jacques Audiard en 26 ans. Avouez que le bonhomme n'est pas pressé... Considéré comme l'un des tout meilleurs réalisateurs français, il était attendu au...

le 29 mai 2012