Entre l’omniprésence de la technologie, le stress, le rythme imposé par le monde dans lequel nous vivons et le fonctionnement actuel des médias, le surmenage peut vite être atteint. Un sujet qui touche de plus en plus de monde, et qu’A plein temps vient adresser avec pertinence et impact.


Le choix d’une femme seule avec deux enfants, vivant dans la campagne aux environs de Paris, permet de rapidement planter le décor du quotidien de nombreux français. Des enfants à faire garder, les trajets en transports en commun en voyant le jour se lever, en voyant les usines et les barres d’immeuble se multiplier à l’approche de la capitale, puis l’arrivée dans cette immense cité grouillante. Un quotidien fait de contraintes, laissant peu d’espace pour respirer, face aux exigences du travail et à la nécessité de s’adapter à ce dernier pour s’organiser. Des contraintes économiques, également, obligeant nombre de travailleurs parisiens à s’installer assez loin de la capitale pour accéder à la propriété. Un équilibre déjà difficile à tenir en temps normal, et qui supporterait difficilement un facteur inconnu.


Le but d’A plein temps ne va pas être de se présenter comme une sorte de reportage qui nous montre le quotidien de Julie, et en particulier cette période marquée par une volonté de changer de travail, au milieu de grèves qui compliquent la tâche à tous les niveaux. Dès les premières minutes, A plein temps dicte un rythme, un ton et une ambiance qui se maintient tout au long du film, une atmosphère oppressante qui retranscrit parfaitement la sensation de vitesse permanente, à l’image d’une course effrénée dont on peine à voir la fin. Avec sa bande-originale aux sonorités électro, ses mélodies utilisant régulièrement des arpèges qui jouent en continu pour matérialiser ce temps qui galope, le film suggère et transmet cette sensation d’épuisement vécu par l’héroïne.


Rares sont les moments de pause, où des petites lueurs espoir s’illuminent pour permettre de lâcher un minimum prise. Cela passera par une conversation au cours d’un covoiturage, d’un coup de main pour la garde des enfants, ou d’appels réconfortants auprès d’une collègue, qui font oublier un minimum cette situation désespérée où Julie semble livrée à elle-même, chaque solution trouvée menant vers un nouveau problème. Laure Calamy trouve ici d’ailleurs un rôle à sa portée, incarnant parfaitement cette femme énergique, tentant toujours de trouver un moyen de régler la situation, au risque de promettre l’impossible et de sans cesse repousser l’échéance.


Les spectateurs ayant connu la vie à Paris ou dans les grandes villes trouveront forcément des échos de ce qu’ils ont vécu ou de ce qu’ils vivent à travers les mésaventures de cette « mère courage », confirmant toute la portée réaliste du film qui s’ancre parfaitement dans la réalité de notre société. Il n’y a pas besoin d’aller dénicher des sujets bien plus complexes que ceux traités dans A plein temps, ce film nous parlant directement et nous confrontant à ce que nous vivons tous les jours et, surtout, car il le fait très bien. Emprisonnée dans un cycle infernal, Julie est l’incarnation d’un monde qui évolue dans une impasse, nous faisant nous demander quand s’en présentera la fin, et si une alternative peut être trouvée pour s’en sortir.


Critique écrite pour A la rencontre du Septième Art

JKDZ29
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le 19 janv. 2023

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