Le major Roy McBride se lance seul dans une mission aux confins du Système Solaire pour retrouver son père, perdu depuis trente ans.


Ad Astra (2019) marque la première incursion de James Gray (dont je n’ai vu que l’excellent We own the Night et l’oubliable The Immigrant) dans le domaine de la SF. Il s’agit d’une SF élégante, atmosphérique et intelligente —dans la lignée de films tels que le mastodonte 2001, l’Odyssée de l’espace (1968), Solaris (1972) ou plus récemment Interstellar (2014). Et très, très intimiste.


Le film est en effet une parabole assez évidente sur la solitude. Tous les personnages en sont frappés, n’étant au mieux que des collègues et au pire des étrangers ou des ennemis. Leurs liens d’amitié ou familiaux, s’ils ont jamais existé, ont disparu depuis longtemps. Même l’humanité est en proie aux divisions et se sent plus seule que jamais, cherchant en vain d’autres formes de vie intelligente.


Plus précisément, Ad Astra parle de cet étrange réflexe humain : s’enfoncer toujours plus loin dans l’isolement, pour espérer follement y trouver un remède. Roy McBride (Brad Pitt) s’aventure dans l’espace profond pour retrouver son père, ce dernier —proxy de l’humanité entière— l’a fait dans l’espoir d’établir un contact avec quelqu’un d’autre (des extraterrestres). Au risque de sombrer dans la folie et le désespoir.


Mais la seule révélation qui se trouve au bout du chemin est celle qu’il n’y a personne. Le seul remède à la solitude se trouve au point de départ. Ces proches qu’on a laissés derrière dans notre folie. Et, encore une fois, la parabole vaut pour toute l’humanité : on ne peut compter que sur nous-mêmes.


Le message est beau, quoiqu’un poil déprimant ou à minima mélancolique, mais finalement assez simple. Surtout qu’on nous le surine sans vergogne au cours du film. C’est d’ailleurs l’un de ses défauts : il se veut intelligent mais in fine manque un peu de subtilité. C’est d’autant plus criant que toute l’histoire qui enveloppe la parabole est parfois un peu branlante. Déjà scientifiquement c’est pas fou (mais bon, Ad Astra ne s’est jamais paré de rigueur scientifique, contrairement à Interstellar), mais surtout il y a quelques trous qui m’ont interpellés.


Pourquoi, si en réalité Neptune n’est qu’à 80 jours de voyage, personne n’a envoyé une mission de sauvetage au Projet Lima ? Pourquoi ce dernier a mis plusieurs dizaines d’années à faire le même parcours ? Pourquoi ne pas envoyer un missile le détruire plutôt qu’on vaisseau ? Et c’est un peu déstabilisant de ne jamais voir la réaction de SpaceCom ou les répercussions de l’abordage du Cepheus par McBride…


Le caractère minimaliste de l’intrigue joue un peu contre elle, je trouve. Ainsi, une fois qu’on a compris le sujet du film, au bout d’un quart d’heure, on n’est jamais surpris et il n’y a rien à faire. Enfin, rien à part se détendre et profiter de cet odyssée mélancolique entre pirates lunaires et vaisseaux en détresse, profiter de l’image, de l’ambiance et du jeu d’acteur de Brad Pitt. Car le film est vraiment beau, et je ne me lasse pas de l’espace. Le film se laisse ainsi très bien regarder. Tellement bien qu’il n’est pas impossible que ma note un poil sévère change avec le temps et un nouveau visionnage, qui sait.


Bref, s’il avait été un peu plus subtil dans son histoire et son message, Ad Astra aurait pu être un chef d’oeuvre. En l’état, il vaut tout de même largement le détour pour les amateurs du genre.

Bastral
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films de 2019

Créée

le 19 sept. 2019

Critique lue 210 fois

1 j'aime

Bastral

Écrit par

Critique lue 210 fois

1

D'autres avis sur Ad Astra

Ad Astra
lhomme-grenouille
5

Fade Astra

Et en voilà un de plus. Un auteur supplémentaire qui se risque à explorer l’espace… L’air de rien, en se lançant sur cette voie, James Gray se glisse dans le sillage de grands noms du cinéma tels que...

le 20 sept. 2019

206 j'aime

13

Ad Astra
Behind_the_Mask
9

L'espace d'un instant

Il faut se rappeler l'image finale de The Lost City of Z : celle de cette femme qui franchit symboliquement une porte ouverte sur la jungle pour se lancer à la recherche de son mari disparu. Ce motif...

le 18 sept. 2019

175 j'aime

24

Ad Astra
Moizi
9

« Le silence éternel de ces espaces infinis m'effraie. »

Film absolument sublime, sans nul doute le meilleur Gray que j'ai pu voir et l'un des meilleurs films se déroulant dans l'espace. J'ai été totalement bluffé, je me doutais bien que le véritable sujet...

le 24 sept. 2019

121 j'aime

15

Du même critique

Les Traducteurs
Bastral
2

Lost in Translation

Les Traducteurs (2020) est un whodunit qui allie sur le papier un concept classique, le mystère en chambre close, à un contexte original : il ne s’agit point d’élucider un meurtre, mais de trouver un...

le 3 févr. 2020

27 j'aime

5

La Terre à plat
Bastral
6

Globalement plat

Alors que certaines plateformes de vidéos en lignes ont été récemment accusées de diffuser sans distinction nombre de pseudo documentaires complotistes, j'ai été intrigué de voir ce La Terre à plat...

le 15 mars 2019

17 j'aime

Millénium - Ce qui ne me tue pas
Bastral
3

Millénium : Ce qui ne marche pas

Difficile de parler d’une suite au Millenium de Fincher. Le réalisateur (Fede Alvarez), les scénaristes, les acteurs, le compositeur, le chef op… sont tous différents ! En plus, il n’adapte même pas...

le 16 nov. 2018

17 j'aime

3