Babouchka
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Une sensibilité à fleur de peau, comme toujours sobrement contenue jusqu'à l'irrépressible étreinte cathartique, digne d'une piéta. Alexandra, dans un monde en guerre se voulant universelle, où règne le chaos ("les saints pactisent avec les diables"), incarne le flambeau de l'Amour entre les hommes, la foi dans l'intelligence. S'appliquant à ne pas lui conférer les traits d'une Sainte Mère, singulièrement tyrannique à l'égard de famille, Sokourov fait d'Alexandra une veuve âgée, affranchie de son rôle d'épouse, se sentant libre, clairement consciente des hautes valeurs humaines. Elle ignore les frontières et les animosités artificielles, la haine stupide, et trouve spontanément l'amitié auprès d'une commerçante tchétchène puis s'en revient dans l'enclave militaire russe les bras chargée de douceurs à l'attention des jeunes soldats, perdus dans ce conflit absurde.
L'esthétique du film, réaliste, moderne, dans un noir & blanc ménageant des couleurs pâles, tranche avec les effets poétiques que j'ai pu apercevoir dans son travail jusqu'à présent (La voix solitaire de l'homme (1978), Mère & Fils. (1997), Elégie de la traversée (2001), L'arche russe (2002)). "Maria", datant de 1988, offre des couleurs d'époque mais n'use d'aucun effet optique. Le choix plastique pour Alexandra se justifie. La musique n'est jamais excessivement lyrique, toujours poétique et murmurée comme une caresse spirituelle. Quelque chose m'a gêné dans la scène finale entre la grand-mère et son petit-fils, je peine à y croire dans le contexte d'un camp militaire, avec des postures trop picturales. Magnifique plan panoramique sur l'immeuble effondré où les deux femmes se rendent en passant derrière un peuplier aux feuilles bruissantes. Belle scène de dialogue sur le sentier du retour entre Alexandra et un jeune accompagnateur, parlant de Dieu et des armes.
Film mineur je trouve, malgré la belle composition de la comédienne et le propos foncièrement pacifique.
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Créée
le 18 oct. 2023
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