septembre 2009:

Un bon petit Chabrol. D'abord je tiens à souligner que dans la filmographie du cinéaste, ce film-là apparait très iconoclaste. Le cinéaste du polar provincial jouant de vilains tours à la notabilité locale, prend là des chemins forestiers bien éloignés de ses thématiques habituelles, en investissant le genre fantastique. On retrouve par contre sa patte dans sa propension à filmer le mystère et également dans la grande attention portée sur la mesure du temps, la patience qu'il a à peindre son portrait, à dessiner son récit. Chabrol se plait à rallonger le temps. La caméra embrasse son personnage, prend le temps d'admirer Sylvia Kristel (ce qui est en soi une épreuve de troublante aisance), de la suivre déambulant dans ce labyrinthe de plus en plus cauchemardesque. Sylvia Kristel en petit rat de laboratoire, erre, arpente, se cogne contre les parois de ce temps, de cet espace insolites, soudain aliénations des plus inextricables. Et Chabrol en vicieux savant de jouer au chat et à la souris étire au maximum ses séquences d'observation. Tout le film est une expérience d'observation qui amène le sujet à se poser mille questions sans réponse à l'image de l'existence même de tout être humain gesticulant devant la perspective bouleversante de sa mort.

Sylvia Kristel dans un français presqu'impeccable promène sa gracile plastique, sa jolie frimousse, sa poitrine en poires et ses longues gambettes dans un univers merveilleux d'une manière plutôt intéressante. Sans aller jusqu'à lui donner une densité extraordinaire, elle parvient néamoins à convaincre avec un rôle peu exigeant il est vrai. Pas sûr que la nudité de Kristel ait d'autres ambitions que d'attirer le spectateur. La sexualité n'est en aucun cas le sujet du film. C'est bien dommage d'ailleurs.

La prestation de Charles Vanel est offerte par un acteur très expérimenté. Son rôle non plus n'est pas vorace en efforts démesurés. Il fait son boulot en père peinard. Honnêtement. C'est aussi à peu de choses près ce que l'on pourrait dire de François Perrot. On s'amusera de découvrir André Dussollier dans un double rôle, antinomique, à la fois prince charmant tout de blanc vêtu et pompiste grossier à la moustache et aux binocles ringardes. Jean Carmet comédien sûr et délicieux fait un peu plus qu'apparaitre mais sa participation laisse un petit goût amer. Trop peu à dire.

Petit film sympathique qui tient bien debout alors que le sujet promettait le pire.
Alligator
7
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le 23 mars 2013

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Alligator

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