Dis-moi, cher abonné, te souviens-tu ce que tu faisais en 2012, plus précisément le 30 mai ? Ah ah, j'étais sûr que tu allais dire ça. Allez, je te donne un indice pour te remettre en situation. Tu devais certainement être dans une salle de cinéma dont tu allais sortir, vers 16H10 / 16H15, ça dépend si le projectionniste était en retard. Ca y est, tu te souviens ?


Donc, si, à cette heure fatidique, tu étais en train de pleurer toutes les larmes de ton corps devant la fin de Prometheus, ou si encore, fou de rage, t'avais arraché un siège pour repartir avec ou le foutre sur la gueule de ton exploitant (façon Bossnigger qui, je suis sûr, parlera encore une fois de zumba), laisse tomber l'affaire, car je pense que ce sera mieux pour ta santé mentale.


Car Alien : Covenant est avant tout une suite de tout le funeste que Prometheus doit représenter pour toi.


Et je me demande bien, dans ce cas, ce que je pourrai écrire pour te donner une quelconque envie de voir ce que sans doute tu détesteras. Et je suis bien embêté parce que moi, je n'ai pas pleuré toutes les larmes de mon corps ce jour là. Même si, et tu as diablement raison sur ce point, on était à des années lumières d'Alien. Mon âme de bourrin te dira qu'on était encore plus loin d'Aliens : Le Retour, mais ce sentiment m'est tout personnel, désolé de cet aparté.


C'est encore une fois le cas avec Alien : Covenant qui, s'il emprunte les atours de la suite prométhéenne, se présente cependant bien plus sous les atours d'un pot pourri des meilleurs instants de toute la saga, revisités, délocalisés, parfois totalement réinterprétés façon slasher. De l'attaque de face hugger (Alien) à la confrontation dans l'infirmerie (Le Retour), de fragments de poursuite en vue subjective (Alien 3) à un nouveau musée des horreurs (Resurrection), presque tout est là. Ne manque plus qu'un monstrueux gunfight apocalyptique à la Cameron et le menu serait complet. Le tout dans l'imagerie de Prometheus, générant à nouveaux quelques superbes plans ultra graphiques et saisissants témoignant toujours de l'oeil d'esthète de Ridley Scott.


Côté thématique, Alien : Covenant ne change pas trop son fusil d'épaule. S'il y est toujours question de création, le dernier né bifurque vers l'idée d'évolution, de processus cyclique et d'éradication de l'espèce humaine avant qu'elle même puisse se reproduire. Ce n'est pas un hasard, en effet, que beaucoup de membres d'équipage soient mariés entre eux. Tout cela dans une atmosphère qui pourrait se rapprocher de celle de l'Île du Docteur Moreau, tout en dessinant un arbre généalogique funeste et perverti. Car il y sera aussi question de l'image du père, bien sûr.


L'action que le réalisateur met en scène, elle aussi, s'avèrera hybride. Ne vous attendez pas à une orgie monstre, parce que finalement, les aliens, on ne les voit pas trop à l'écran. Tout le contraire d'Aliens Le Retour, quoi. Non, les débordements seront à noter du côté gore de l'entreprise, assez généreux et ultra graphique. De sorte que le spectacle s'avère assez plaisant et fait passer les deux heures du métrage comme un souffle et sans aucun ennui. A l'image de l'exploration de cette nouvelle planète, baignée dans un silence de mort inquiétant seulement troublé par le souffle du vent.


Alors Behind, pourquoi seulement ce 7 alors que visiblement, t'as bien kiffé ?


Oui, en effet, j'ai bien aimé ce Alien : Covenant. Et je pense même qu'il mériterait un 7,5, tant il est noir, parfois désespéré. Mais il est aussi un peu décalé dans certains de ses aspects, parfois maladroit. Si Ridley Scott semble par exemple vouloir introduire un personnage via un univers gothique lorgnant du côté de Dracula, il n'évite cependant pas que le spectateur, surpris, pense l'espace d'une seconde... Qu'un morceau d'Assassin's Creed a été égaré dans la copie de Covenant. De la même manière, le réalisateur semble parfois vouloir prendre les attentes de son audience à contre-pied... Pour mieux convoquer un élément précis d'un épisode précédent.


Mais ces quelques défauts ne sont que simples avatars devant LE talon d'Achille du film, constitué par un casting hallucinant de no-name au charisme tout simplement absent et parfois décrits dans leurs actes comme totalement naïfs, voire franchement teubés. On est à des kilomètres de ce que Sigourney Weaver incarnait et de son image passée dans l'inconscient collectif. On est très loin de l'équipage d'Alien, dont la caractérisation était immédiate et les conflits expliqués que par quelques lignes de dialogues ou des sous-entendus. Ici, Scott ne les définit que par le biais unique de l'image forte liée à la perte, rien de plus. Ridley s'étant sans doute rendu compte que l'audience 2017, pour rester devant un écran, doit être assistée constamment par l'image, fut-elle aussi inutile que forte.


Mais c'est aussi l'occasion d'ouvrir un boulevard à la figure classique de l'androïde chère à la saga, Covenant le propulsant au coeur de son système nerveux en en faisant un personnage magique d'ambiguïté, monstre de froideur mais finalement envahi d'émotions terriblement humaines, et décrit dans un relation finale qui tombe sous le sens.


C'est ainsi qu'Alien : Covenant, aussi imparfait soit-il, constitue un objet attachant et pétri de qualité formelles faisant dire que malgré ses quatre-vingts printemps, Ridley Scott demeure un sacré mother fucker.


Behind_the_Mask, en plein cancer du colon.

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le 11 mai 2017

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