(légères modifs après revisionnage)


C’est la conclusion de la trilogie donc. Autant dire que c’était là une de mes rares attentes de l’année puisqu’on devait trouver ici un aboutissement aussi bien thématique que d’action. Prenant en prime comme cadre de jeu la ville de Washington DC, on s’attendait carrément à voir un assaut de la maison blanche et une solide surenchère politique. Il y a bien surenchère, hélas pas où il aurait fallu…


La nouvelle purge se déroule sans exception, telle est la nouveauté. Dans le but de se débarrasser d’une sénatrice ultra démocrate militant contre l’établissement de la purge, les pères fondateurs font donc sauter la dernière entrave à la purge. Il aurait été plus prudent d’envoyer un simple commando ni vu ni connu sans rien dire, mais bon, le film n'est pas subtil dans les détails (DeMonaco oublie encore de rajouter des faits importants comme une impopularité de plus en plus forte due à la prise de conscience des masses qui, si elles sont prises pour cible par une minorité active, sont toujours consultées pour leurs votes, même si leur pouvoir de nuisance est minime). On devra se contenter d'un "pour une purge plus égalitaire". D’ailleurs, on retrouve pour l’essentiel les thèmes de the purge 2 ici développés vers une lutte armée réelle entre classes sociales, sensé être gonflés par le cadre de la capitale et donc de la présence du gouvernement. Mais on ne verra pour tout symbole… que la statue de Lyncoln avec un peu de sang dessus. La maison blanche est épargnée, on ne parle d’aucun autre bâtiment officiel, et l’arnaque de la fin (dans une église catholique) est à se tordre. Toute la portée politique du bestiau se focalise exactement sur ce que je n’avais pas aimé dans le second épisode. Ainsi la minorité exploitante de la purge sont les riches blancs chrétiens. C’est surtout le côté religieux développé dans la Purge qui m’énerve, tellement il en devient excessif. Les riches blancs protestants ont tous fait évoluer leur religion vers un délire purificateur prônant l’apologie du meurtre qu’on se demande comment ils font pour tenir toute une année sans tuer personne d’autre tant ils glorifient des actes purement barbares. Cette fascination pour le meurtre est ancrée profondément avec les riches blancs cathos (je n'assimile pas ces variations du christianisme, mais le film se focalise sur le côté catho), enfonçant davantage le clou dans l’association riche et psychopathe validée par deMonaco. Mais à trop insister dessus (et ici en dépassant allègrement les excès déjà gros de the purge 2), il réduit considérablement la portée de son film, qui passe son temps à montrer les méchants politiciens comme des fanatiques, des psychopathes (évidemment vulgaires dans leurs costumes à 9000 dollars, traitant les pauvres et les adversaires d'enculés...), sans oublier les éternels racistes blancs arborant des croix gammées... Le culte de la purge devait initialement servir à traiter de l'influence de la religion sur la politique (sujet costaud aux Etats Units, complètement désuet en Europe, bien que nous reprenions conscience de cela avec l'Islam), mais il en devient une cause principale tellement caricaturale que le sérieux de l'entreprise en est ébranlé. Les masques de statue de la liberté, de George Washington ou de Lyncoln sont vidés de toutes substance, réduits à de simples gadgets qui n'apportent jamais de dimension politique à l'ensemble (les touristes russes, on va en reparler). Quant aux minorités ethniques, elles marchent toutes ici main dans la main contre l’oppresseur gouvernemental (d'ailleurs bien mal géré, puisqu'au lieu de se terrer dans des forteresses imprenables alors même que la purge autorise leur mise à mort, il choisit de se réunir dans une église peu défendue et dont le rassemblement était déjà annoncé des mois à l'avance). Difficile alors, malgré la sénatrice blanche (globalement politiquement correcte, mais qui pêche parfois l'électeur à coup de "je ne connaissais pas tous ces trucs de gang, mais c'est cool"), de ne pas y voir du bon gros politiquement correct anti-blanc qui tape sur des clichés vieux comme le monde qui devraient être infiniment plus subtils pour illustrer le message politique promis. Alors, quand les noirs se mettent tous à s'appeler "négro" et ont tous un passé criminel dans les gangs, c'est la fête du slip question clichés (cette association minorité-gang est d'un naturel un peu gênant).


Les quelques points positifs restent l'aspect ludique du jeu de cache cache dans la ville en proie au chaos (pas très chaotique non plus), le développement des thématiques du 2, et sur l'intervention de quelques personnages secondaires intéressants, notamment pour ceux qui sortent les nuits de purge afin de porter assistance aux victimes. Ce concept de samu social est intéressant et plutôt un bel exemple dans une société prônant aussi ouvertement l'individualisme. De même, la violence remonte d'un cran et se révèle efficace, sans détourner les yeux lors des scènes costaudes. On y gagne un peu, même si la politique continue toujours à être approximative et bourrine. DeMonaco essaye davantage de faire un bon thriller qu'un brûlot politique, et si l'efficacité globale fonctionne, les grosses bavures empêchent le tout de prendre son envol. Et donc, il ne met jamais assez de bons détails aux bons endroits. Le seul concept rigolo et novateur de cet opus... est l'évocation du tourisme de meurtre, idée tordue... expédiée en une phrase de 10 secondes alors qu'il s'agit là d'un vrai concept absolument génial (on imaginerait déjà les cars de touristes blindés circulant tout canon dehors en faisant feu de tous les côtés, qui part plutôt vers une critique des étrangers américanophobes, ce qui n'est pas vraiment très subtil (avec cet accent russe en plus))... Bref, la saga the purge se termine en petite moyenne qui a au moins le bon point de faire bouillir le cerveau. Je pars déjà sur un projet de remake, les bonnes idées seraient les bienvenues pour enrichir le script.

Voracinéphile
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le 21 juil. 2016

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