Pour son second long-métrage après "L'enfance d'Ivan", Andreï Tarkovski met en scène la vie d'un moine et peintre d'icônes dans une Russie du début du XVème siècle troublée par diverses luttes intérieures...

C'est en un prologue et huit tableaux que Tarkovski construit son film, mettant en avant les pensées et l'errement d'Andreï Roublev dans cette société où violence, trahison et inhumanité font rage. Co-écrivant le film qui est d'une grande justesse et intelligence d'écriture, tant dans les dialogues que les personnages ou le scénario, Andreï Tarkovski laisse le spectateur interpréter ce qu'il voit à l'écran, offre plusieurs réflexions souvent abouties autour de la foi, de la religion, de l'espoir, de la place de l'art mais aussi de l'humain et de la vie, tout simplement.

"Andreï Roublev" reste une leçon de cinéma et une expérience qui n'est pas prête d'être oubliée. D'une puissance et d'une maîtrise rare, dont la réflexion et l'atmosphère qui se dégageant de chacun de ses tableaux empêchent tout ennui malgré son rythme contemplatif. Très vite, le personnage de Roublev devient fascinant et d'un simple regard exprime tout un éventail de pensées et d'émotions. Mais c'est aussi par ses enjeux qu'il le devient, sa vision de la vie et de l'art, sa conception de Dieu et comment il peut/doit le représenter, notamment sous un régime totalitaire, faisant répercussion avec l'URSS dans laquelle Tarkovski a vécu. Un dieu qui finalement n'empêche pas la violence, l'injustice et la cruauté sur terre.

Bien que braquant sa caméra sur Roublev (bénéficiant de la justesse d'interprétation d'Anatoli Solonitsyne), Tarkovski n'en oublie pas les autres personnages, notamment Boriska dans la dernière partie d'un récit qui se finit de manière aussi forte qu'inoubliable. Derrière la caméra, Tarkovski offre plusieurs scènes d'une grande richesse et ampleur, sublimé par de magnifiques plans permettant de nous immerger durant trois heures dans la Russie du XVème siècle et dans la vie d'Andreï Roublev.

Légèrement sceptique avant de commencer, tous les doutes se sont vite dissipés face à l'ampleur et la richesse de cette oeuvre aussi inoubliable qu'intelligente et, en nous faisant suivre l'errement d'Andreï Roublev, évoque l'art, la vie, l'humain ou encore la foi.
Docteur_Jivago
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le 23 janv. 2015

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Docteur_Jivago

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