Même si les films de Sogo Ishii sont très différents au niveau du style, on peut découper sa filmographie en 3 grosses périodes.
Ainsi, il y a la période plutôt punk très énergique et chaotique : Crazy Thunder Road / Shuffle / Burst City / Halber Mensch, la période calme et posée : Master of Shiatsu / Angel Dust / August in the water / le labyrinthe des rêves et puis le retour à un style plus énergique avec ses derniers films : Electric Dragon / Dead End Run.
Crazy Family et Gojoe ayant volontairement été mis à part car ils font tous deux figure de films de transitions.
August in the water fait donc partie de la seconde grosse période calme et posée du cinéaste que l'on pourrait associer plus particulièrement avec Angel Dust car les deux films sont très proches même s'ils possèdent une vision opposée. Car comme le dit si bien Sogo Ishii : " L'un à la forme d'un cauchemar et l'autre celui d'un rêve. ", si dans Angel Dust, tout était fait pour rendre l'ambiance oppressante et stressante, que ce soit par les jeux de lumière, les divers sons du métro et des diapositives ou encore un personnage principal renfermé sur elle-même, dans August in the water c'est tout le contraire on est devant un film onirique, une sorte de conte fantastique porté par une musique hypnotique proche du style d'un Jean Michel Jarre à coups de synthétiseurs.
Cependant, si de part ce fait August in the water est donc beaucoup plus accessible que son vis à vis, il est tout de même assez long à démarrer si bien que durant toute la première partie on en est même à ce demander si Ishii ne va pas nous refaire une énième variation de Jules et Jim.
Heureusement, il n'en est rien et cet univers assez réaliste et basique à tout niveau (mise en scène plan par plan, musique basique et classique, univers réaliste) va peu à peu se transformer en univers paranormal et fantastique porté par une musique cosmique. Ce qui va déclencher ce basculement c'est tout d'abord l'évanouissement d'Izumi pendant le festival Yamagasa (tradition historique visant à porté un temple en bois à travers la ville pendant que les passant jettent de l'eau sur son passage) qui si on se souvient bien était également un des éléments importants du 1er film de Ishii : Panique au lycée, dans lequel un des personnages se rappelle du festival en flashback qu'il a effectué avec le jeune preneur d'otage en précisant bien qu’après ça rien ne fut plus comme avant.
Dans le cas de August in the water, Ishii se sert du festival pour renforcer tous ses mythes et superstitions auxquels les Japonais sont encore attachés malgré que ce soit un des pays les plus technologiquement avancé. Car c'est là tout le paradoxe du Japon possédant une société ultra moderne mais avec des habitants encore ancrés dans les traditions qui croient encore aux légendes et autres rites ancestraux, cette opposition dans le film n'est d'ailleurs pas sans rappeler le Inugami de Masato Harada possédant de nombreuses similitudes avec August in the Water.
Et puis arrive le second événement, l'accident d'Izumi lors d'un plongeon qui va définitivement faire s'envoler le film vers les cieux. Les séquences de plongeon que Ishii s'amuse à filmer à travers des angles multiples en utilisant un montage très musical. Un peu de la manière du virus de Kairo de K.Kurosawa, la maladie changeant les personnes en pierre va alors s'amplifier et c'est associé à une sécheresse accablantesque la situation va alors devenir dramatique. Car Izumi dont le prénom veux dire la source en Japonais (sous-entendu la source d'eau) est la cause de tout ses désastres mais c'est également elle qui a le pouvoir de les arrêter. On assiste donc à 30 dernières minutes véritablement sublimes dotées d'une atmosphère planante et avec des plans superbes comme le plan de nuit où la pleine lune éclaire le lac dans lequel s'enfonce peu à peu Izumi. Pleine lune encore une fois symbole de fantastique pour Ishii qu'il utilise également comme tel dans Angel Dust, Gojoe ou encore Dead End Run.
Finalement, August in the water est une fois de plus un film plein de sensations où le travail sonore de Onogawa Hiroyuki s'adapte parfaitement aux images, et même si le film est un peu long à démarrer, l'envol qui s'ensuit nous laisse l'impression d'avoir vécu un rêve.