Le nouveau documentaire Avicii : I’m Tim, sorti sur Netflix fin 2024, se présente comme une suite plus intimiste à Avicii : True Stories (2017). Si ce film offre un regard personnel sur Tim Bergling grâce à des archives inédites et des témoignages émouvants, il reste malheureusement bien plus en retrait sur les pressions et les dérives de l’industrie musicale qui ont contribué à sa tragédie. Là où l’on aurait pu espérer une analyse approfondie des mécanismes qui ont conduit au suicide du jeune DJ en 2018, le réalisateur Henrik Burman semble privilégier la nostalgie et l’émotion, au détriment d’un regard critique et incisif.
Une critique édulcorée de l’industrie musicale. Contrairement à True Stories, qui abordait déjà avec une certaine audace les luttes personnelles d’Avicii face à un système oppressant, ce nouveau documentaire reste en surface. Les pressions exercées par l’industrie musicale, les tournées incessantes et l’épuisement psychologique de l’artiste sont évoqués, mais de manière trop timide. On perçoit un entourage parfois opportuniste, profitant de l’ascension fulgurante d’Avicii sans toujours se soucier de son bien-être, mais ces dynamiques ne sont jamais véritablement dénoncées. Le film préfère s’attarder sur des moments de gloire et des souvenirs touchants, jouant sur la corde sensible des fans plutôt que de pointer du doigt les responsabilités systémiques. Cette approche manque de courage et laisse un goût d’inachevé, comme si l’on cherchait à ménager certains acteurs de l’industrie encore influents.
Ce qui interroge davantage, c’est le timing de ce documentaire, qui coïncide avec la sortie d’une compilation posthume des plus grands succès d’Avicii. Cette simultanéité n’est pas anodine et soulève des questions sur les véritables intentions derrière ces projets. En 2017, True Stories accompagnait la sortie de l’album posthume Tim, dont les revenus étaient intégralement reversés à la Tim Bergling Foundation, créée par les parents de l’artiste pour sensibiliser à la santé mentale et prévenir le suicide. En revanche, rien n’indique que les bénéfices de Avicii : I’m Tim ou de cette nouvelle compilation soient destinés à une cause similaire. Pn peut se demander si ces initiatives visent avant tout à relancer la machine commerciale, transformant la mémoire d’Avicii en un simple produit de consommation.
Au final, Avicii : I’m Tim laisse un sentiment ambivalent. S’il permet de raviver l’émotion autour d’un artiste qui a marqué toute une génération avec des titres comme Wake Me Up ou Levels, il échoue à rendre un hommage véritablement significatif en évitant de confronter les véritables causes de sa disparition. À l’heure où d’autres initiatives, comme le musée Avicii Experience à Stockholm, participent également à cette monétisation de sa mémoire, il est légitime de se demander si l’industrie ne continue pas, même après sa mort, à profitez de l’image et du talent d’Avicii comme elle l’a fait de son vivant.