Englishman in Hollywood - en bref et quelques caviardages

Si le nouveau Wright apporte beaucoup de bonnes choses et change radicalement de contexte en terme de production, il pêche à mes yeux là où l'on ne pouvait vraiment s'y attendre.


Le gros point fort du film et les principaux axes d'amélioration, en considérant la filmographie du bonhomme jusqu'alors, se résument à la partie technique.
Tout dans la technique a à mon sens fait un gros bond en avant. Qui dit production hollywoodienne implique forcément une débauche de moyens supplémentaires qui donnent ici, au réalisateur et son équipe, beaucoup plus de latitudes.
La réalisation, franchement de haute volée réussi le grand écart entre scènes d'action vraiment électrisantes, chapes de plomb dans l'établissement des rapports au sein du groupe et scènes beaucoup plus intimistes comme la laverie.
Le montage aussi s'est grandement amélioré, pour être en accord avec les attentes modernes qu'un blockbuster d'action doit satisfaire. Si on retrouve comme d’habitude beaucoup d'effort dans les transitions, la parfaite incorporation de la musique dans le montage (ou inversement) et le sens de la rythmique se révèlent être en sus deux excellents vecteurs de tensions et de décalages, donnant au passage à Baby beaucoup plus de moyens d'expression.
Enfin, le casting et la direction des acteurs sont au diapason : Elgort s'en sort plutôt bien, Lily James est envoûtante, jouant parfois de ses cordes vocales, Berntal, Hamm, Spacey et Hamm s'en sortent vraiment très bien aussi et constituent un solide casting de braquos. Petite déception personnelle en revanche avec le personnage de Foxx, trop caricatural et irritant. Dans la mesure ou il s'agit très certainement d'un choix du scénariste, difficile de lui reprocher de tenir son rôle.


Maintenant au rang des contrariétés je reléguerais directement l'écriture : quel est le pitch du film ?
Un jeune homme troublé par la perte de


sa mère, tombe amoureux d'une jeune femme qui partage pas mal de traits communs avec celle-ci. Bonjour Œdipe.
Lorsqu'elle sera mise en danger, il ira jusqu'au bout pour la sauver.


En soit pourquoi pas, mais quel est le message du film ? Peut-être n'était-ce qu'un prétexte pour Wright, qui, émancipé de sa trilogie Cornetto, avait les moyens et pour seule ambition de se faire plaisir dans un nouveau genre comme il l'avait déjà fait auparavant avec Scott Pilgrim ? C'est cette quête de sens que j'ai aimé dans son triptyque, et particulièrement le message en sous-texte, qui émanait d'une démarche personnelle ou commune avec Simon Pegg. Une semaine après le visionnage, je ne parviens toujours pas à mettre le doigt dessus.
La structure n'est déjà pas très claire : quel est l'élément perturbateur ? L'arrivé de Bats dans la vie de Baby ?


Pourquoi le personnage de Spacey exécute un revirement radical ? Parce que Baby est amoureux ?
À la base il vient pour une cassette, pourquoi la lui refuser pour finalement se sacrifier pour les sauver ?


Ok, ça entraîne une cascade impressionnante, mais scénaristique ment c'est un peu limite.
En quoi le personnage principal s'est il amélioré à l'issue de ses péripéties ? Il a grandi (embrassé la violence de ses actes), expié ses péchés (accepté les conséquences)


sur une peine de prison limitée parce que c'est un good guy ?


Pourquoi recourir à des set up pay off aussi flagrants quand on était habitués à plus de subtilités avec tout le travail de Wright sur le foreshadowing dans ses films précédents ?


(le coup de la cassette Mom, la guichetière, les tubes métalliques et une tonne d'autres)


Ça ne gâche pas le film, mais ça le dessert franchement.


Et puisqu'on en est à parler de cassette, j'ai fait l'effort d'aller le voir en V.O. pour profiter des mixtapes du personnage principal, sauf que cette excellente idée ne sera pas exploitée au-delà du simple gimmick.
Non pas que ce soit dérangeant d'avoir dans les esgourdes une bande son rock eighties de qualité, mais j'espérais vraiment beaucoup plus du point de vue musical.


Quoiqu'il en soit ça reste un film d'action efficace, proposant des scènes de courses poursuites impressionnantes. À ce titre, le braquage d'ouverture et la fuite qui lui succède est une excellente scène d'exposition puisqu'elle intègre tout ce qui caractérise Baby, porté par une succession de cascades qui arrachent la rétine.


Espérons que le cinéma de cet auteur retrouve ses qualités d'écriture tout en conservant une réalisation de haute volée.

YvesSignal
8
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Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les meilleurs films de 2017 et Les meilleurs films d'Edgar Wright

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le 25 sept. 2017

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Yves_Signal

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