Ce film de crocodile est une chaussure qui bâille de la semelle


Il y a trois gentils petits singes qui sont assis dans un arbre et qui taquinent Mr Crocodile : "Essayez de m'attraper".



Black Water réalisé par Andrew Traucki et David Nerlich est un survival horror mettant en avant 3 touristes accompagnés d'un guide qui durant une partie de pêche en canoë dans les marécages Australiens entourés de mangroves, se retrouve confronté à un crocodile affamé qui va les faire chavirer et forcer le groupe à se percher dans des palétuviers (arbres poussant dans la vase des littoraux tropicaux) au-dessus des flots, attendant l'heure fatidique où ceux-ci seront obligés de remettre un pied dans l'eau pour aller chercher l'embarcation située à quelques mètres d'eux. Black Water est un film Australien à petit budget qui parvient avec crédibilité à présenter une intrigue basée sur des événements vrais, qui tout du long semble être véritablement possible au vu du réalisme proposé (à une exception près sur laquelle je reviendrai plus tard). La force de ce survival est qu'il nous pousse à nous mettre dans la peau des personnages, au point de se demander ce que l'on ferait si on se retrouvait à la place du groupe coincés dans palétuviers au milieu d'un marais coupé du monde avec un terrible crocodile prêt à croquer le premier plongeant un pied dans l'eau.


Bien que le scénario soit mince, l'idée de départ est excellente, les problèmes du film apparaissent rapidement tant l'action est extrêmement réduite et lorsque celle-ci s'applique elle se révèle assez sporadique à cause d'un rythme terriblement mal géré. Il y a beaucoup de temps mort qui malheureusement ne parviennent pas à être comblé par la tension atmosphérique proposée puisque dès que les personnages sont sur les palétuviers l'on sait qu'ils ne risquent plus rien. Au départ, les survivants dans les arbres tentent de trouver un moyen de s'échapper, devant faire face à des obstacles dus à la nature qui maintiennent le spectateur en haleine. Seulement, ils abandonnent rapidement la tentative de fuite et restent coincés dans les arbres dans l'attente en ne faisant rien de spécial, ce qui rend les séquences longues, très longues. Un peu plus d'idées scénaristiques auraient pu rendre ces séquences moins ennuyantes. La réalisation n'a rien de stupéfiant, la mise en scène est lambda et la composition musicale de Rafael May n'aide pas beaucoup les différentes séquences à être plus stridentes. Heureusement, il y a quelques scènes agréables à regarder qui dans un réel sentiment de crédibilité parviennent à nous stresser.


La conception des décors dans une nature sauvage isolée offre une configuration idéale pour rendre la menace du crocodile perceptible, plausible et vraisemblable. Le crocodile est bien fichu, la plupart des plans le mettant en avant étant ceux d'un véritable bestiau cela aide à rendre ses mouvements crédibles. Les quelques plans mettant en avant un faux crocodile sont assez visibles, mais grace à de petits artifices cela reste totalement digeste. Les cinéastes décrivent efficacement le sentiment de cruauté et de bestialité primaire qui anime le crocodile. J'ai malgré tout un problème avec la séquence finale, puisqu'un des trois personnages principaux se retrouve dans la gueule du crocodile qui l'amène vers son garde mangé mais sans le tuer, ou le blesser mortellement. Cela me semble tiré par les cheveux mais passons, un peu de chance dans toute cette malchance fait du bien. Le souci, c'est que deux fois ce personnage se retrouvera totalement dans la gueule du bestiau, et deux fois il en ressortira avec peu, ou pas de blessures. Pour un film qui tout du long appuie sur le réalisme je trouve cela un peu problématique.


Les acteurs sont dans l'ensemble plutôt solide même si je reproche un manque de fonds scénaristique autour de ceux-ci. Plus d'implication dans l'écriture aurait pu rendre l'attente dans les arbres moins longs, élément qu'aura parfaitement compris Andrew Traucki puisque pour la suite "Black Water : Abyss" (qu'il réalisera), il mettra en place une sous-intrigue entre les personnages qui accentuera encore plus la dimension tragique des évènements. Les rôles principaux joués par Diana Glenn en tant que "Grace", Maeve Dermody sous les traits de "Lee" et Andy Rodoreda pour "Adam" offrent quelques moments de bravoures efficaces en montrant une manière crédible d'appréhender cette terrible confrontation en faisant des plans d'évasion logique et des tentatives qui me semblent justifiées. La finalité autour des personnages reste dans l'ensemble satisfaisant avec des moments dramatiques déchirants, même si l'instabilité du rythme rend l'action du groupe par moments ennuyants.


CONCLUSION :


Black Water réalisé par Andrew Traucki et David Nerlich est un survival horror sympathique faisant preuve de quelques idées ingénieuses pour un budget faiblard qui font qu'on ne peut que respecter le rendu final, bien que j'émet des réserves sur certains points à commencer par le rythme qui est terriblement mal géré. Néanmoins, si vous êtes en quête de frisson horrifique Black Water sera à même d'y répondre dans un semblant de réalisme surprenant dans lequel on laissera échapper quelques bâillement.


Comme le dit si bien un proverbe africain : "N’insultez pas le crocodile lorsque vos pieds sont encore dans l’eau."

B_Jérémy
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le 13 mai 2021

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