Los Angeles en 2019, il y a cinq ans déjà

C'est un film que j'ai vu à sa sortie mais dans une version qu'avait désavouée Ridley Scott puisqu'aujourd'hui on ne peut voir que la Director's Cut. Enfin, c'est le cas de mon DVD.

Ce qui change essentiellement, vu de ma fenêtre, c'est la fin bien plus pessimiste mais bien plus ouverte que celle que j'ai vue au cinéma.

En tous cas, Director's cut ou pas, je me souviens que ça avait été une belle claque en 1982 … Heureusement, 2019 était encore loin à cette époque ... Cette histoire de chasse de ces androïdes appelés réplicants archi-performants tellement évolués qu'ils étaient capables d'émotion et même d'avoir un passé. Ces androïdes, qui ressemblent en fait à des clones, ayant une durée de vie très courte (4 ans) cherchent, à tout prix, à rencontrer les concepteurs (leurs pères ?) pour obtenir un sursis, une reprogrammation en quelque sorte …

Mais, au-delà de l'histoire, il y a toute une réflexion sur ces deux populations humaine et humanoïde qui est en filigrane du film. L'être humain sait bien que sa durée de vie sur terre est limitée (la vie est une maladie mortelle dont on ne guérit jamais, comme on dit). Mais on a le temps et on n'y pense pas tous les jours. Tandis que les humanoïdes ont une conscience encore plus aiguë puisqu'ils savent qu'on les fait vieillir prématurément. Alors qu'on les a affublés de tout ce qui fait l'être humain avec ses souvenirs, ses envies et ses sentiments. Quelle injustice ! Mais quel débat philosophique/métaphysique si on se met à imaginer que ces humanoïdes, s'ils s'humanisent de trop en leur accordant un plus grand vieillissement, pourraient à terme signifier la fin de l'humanité.

Suivant un principe de précaution qui ne dit pas son nom, on se doit donc de tuer ce qu'on a créé.

Plus fort aussi, le film interpelle sur ce qui fait la spécificité de l'être humain. Ses souvenirs d'enfance, par exemple, n'ont rien d'inné car ils s'acquièrent lentement. Si on les introduit dans un clone créé à l'âge adulte, au fond, quelle différence y-a-t-il ?

On le voit sur le personnage de Rachel, très élaboré, qui dispose de souvenirs et n'a même pas conscience d'être différente.

Les tests pratiqués pour déceler le caractère non humain du réplicant se focalisent sur l'absence de relation ou d'empathie envers les animaux. Capacité ou qualité qui n'a pas été jugée utile d'être implantée dans les clones. Ça m'interpelle à deux niveaux. Si on n'inculque rien dans l'éducation d'un enfant à ce sujet, il peut ne pas développer la moindre empathie envers les animaux. Mais si je considère le cas du réplicant Roy (Rutger Hauer) à qui on n'a rien inculqué. Non seulement il éprouve de la sympathie ou plutôt une forme de solidarité envers les autres réplicants mais en plus, dans ses derniers instants, il tient dans ses mains une colombe blanche qui ne semble pas effarouchée …

La mise en scène du film est juste extraordinaire avec ce Los Angeles gris, pluvieux, glauque où la foule semble complètement apathique et où la publicité intrusive est omniprésente. Seule, la Tyrell Cie, la société qui fabrique les réplicants est installée en haut d'un gratte-ciel, au- dessus de la couche de brume persistante, et voit le soleil …

Le film est bien servi par cette obsédante musique de Vangelis.

Un mot sur le casting parfait où on retrouve Harrison Ford dans le rôle du Blade Runner face à Rutger Hauer dans le rôle d'un réplicant pourchassé et si humain et face à Sean Young dans le rôle de Rachel, la réplicante troublée par la soudaine prise de conscience de son état, troublée par Harrison Ford…

Et si, comme le suggère Rachel, on faisait faire le fameux test au Blade Runner (Harrison Ford), qu'en ressortirait-il ? Peut-être, une réponse à cette question dans la suite imaginée par Villeneuve que je ne connais pas mais dont on m'a prêté le DVD et que je devrais découvrir dans les jours qui viennent …

JeanG55
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le 10 mars 2024

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