De tous les films tournés pendant le confinement (Malcolm & Marie, Lui...), Bo Burnham : inside en est de loin le plus représentatif. Une création inédite et pétrie d’émotions en tous genres, fruit d’un travail gargantuesque sur le plan artistique et technique. Mené seul, de surcroît.
Il n’est pas de meilleur créatif que celui qui parvient à l’exprimer dans cadre restreint. 2020 : profitant comme nous tous du temps qui lui est alloué pendant le confinement, l’humoriste américain Bo Burnham se lance dans ce qu’il appelle un “projet” : un spectacle musical écrit, réalisé, filmé, monté et interprété par…lui-même.
- Soit c'est du génie, soit c'est de la folie.
- Ce qui est le plus marrant, c'est que le plus souvent, ces deux choses vont ensemble.
Pirates des Caraïbes, la malédiction du Black Pearl
Dans Bloqués ou Comment c’est loin, Orelsan et Gringe déployaient une énergie folle à incarner la flemme, aussi bien dans leur écriture que dans leur mise en scène. Ici, c’est pareil : derrière un personnage foutraque au possible, une réal militaire, et des idées à la pelle. C’est bien simple : on compte ainsi autant de variétés de cadrages et de jeux de lumières que d’humeurs traversées par le personnage en un heure et demie. A la manière dont un Youtuber le ferait, lui, à travers une dizaine de vidéos. Ici, chaque meuble est exploité, chaque accessoire a un rôle à jouer, chaque mur devient un espace de jeu, chaque objet qui traîne (des composants électroniques, essentiellement) devient une pièce maîtresse pour habiller le cadre, décidément fort bien vêtu.
Sur le fond, là encore, c’est très simple : rarement les mots “comédie” et “musical” n’ont eu autant de sens que dans cette comédie musicale-ci : l’écriture est au cordeau, les compos sont entraînantes, les clips sont captivants, les sketchs sont redoutables. En une heure trente, Bo Burnham balaye une flopée de sujets aussi anecdotiques (les facetime avec ta mère, les sextos…) que satyriques (une chanson sur Jeff Bezos, une caricature des marketeux, un hommage aux stagiaires non-rémunérés). Sans parler de cette façon géniale de tourner en dérision les youtubers (encore eux !) qui se filment en train de réagir à des réactions de vidéo.
En fait, tout se passe comme si on assistait à un one man show manqué. Comme si, d’un manque à combler, son interprète transformait chaque frustration en un coup d’éclat. Un simple délire introspectif pour les uns, un coup de génie pour les autres. Quoi qu’il en soit, créativité et prouesse technique sont ainsi au rendez-vous de ce spectacle musical délirant d’où émerge une sacrée révélation en la personne de Bo Burnham.