BORG/MCENROE (14,2) (Janus Metz Pedersen, DAN/SUE, 2017, 108min) :
Cet habile double biopic psychologique se penche sur deux légendes du tennis, le suédois Björn Borg, numéro un mondial et un jeune intrépide et colérique américain John McEnroe au moment où leur concurrence récente va atteindre son paroxysme, lors de la finale mythique de Wimbledon, le 5 juillet 1980. Janus Metz Pedersen découvert avec le percutant et immersif documentaire Armadillo (2010) s'empare de ces deux icones tennistiques pour nous immerger dans les coulisses intimes de ces deux champions. Non sans s'éloigner de ces qualités de documentariste, le cinéaste mise sur une réalisation élégante et dynamique pour décliner un narration somme toute assez classique composée de flashbacks, avec une mise en lumière de l'enfance, avec scènes d'entraînements intensifs, nombre de sacrifices effectués et une peur de perdre maladive tout en tentant l'un comme l'autre d'exorciser leur démons par la victoire. La caméra tente de percer psychologiquement les affres de ces deux athlètes par le biais de nombreux plans très serrés. Le metteur en scène n'évite par certains écueils du Biopic, genre usé jusqu'à la corde, ni certains faits manquants, mais il arrive grâce à une ingénieuse reconstitution, à livrer une narration haletante jusqu'au fameux choc des titans, dans le temple de Wimbledon. Cette dernière partie, malgré quelques artifices de trucages parfois maladroits et des successions rapides de plans pour masquer certaines invraisemblances, retranscrit de fort belle manière le combat d'anthologie, livré par ces deux hommes aux caractères bien trempés, sur le court central londonien. Janus Metz Pedersen avec un certain talent de dramatisation du match à travers un pertinent montage, garde ainsi toute l'intensité exceptionnelle de l'épique déroulement du combat, pendant lequel ces deux gladiateurs surdoués au milieu d'une foule rarement aussi exubérante en ce lieu, sont allés au-delà de leurs limites psychologiques pour ne pas défaillir. Une grande messe en lutte majeure qui atteint des moments de grâce, à travers une réalisation soignée et captivante donnant le frisson malgré l'issue de la rencontre connue. Le réalisateur soucieux d'une grande véracité s'appuie sur les deux interprètes : Sverrir Gudnason (Björn Borg) et Shia Labeouf (John McEnroe) qui s'avèrent assez convaincants dans la gestuelle tennistique et dans les comportements sur le terrain et en dehors accompagnés par des seconds rôles épatants dont Stellan Skarsgård, l'entraîneur mentor cérébral de l'athlète suédois. Un double portrait parallèle réussi illustrant une rivalité saine pour l'émulation sportive, comme le passionnant film Rush (2013) de Ron Howard avait décrit superbement le duel Niki Lauda/James Hunt pour le titre de champion du monde de Formule 1. Ici, le cinéaste souligne de façon plus profonde le combat intérieur éprouvant pour dompter ses fragilités et ses émotions, afin de pouvoir donner le meilleur de soi-même sur le terrain, et il décline astucieusement une amicale confrontation de caractères qui changent et rapprochent les deux hommes. Sans l'autre nous ne sommes rien...Les trajectoires croisées prouvent à nouveau la force de cet adage. Alors venez monter au filet, vous ne connaîtrez pas de revers avec cet attirant Borg/McEnroe. Séduisant. Prenant. Touchant.