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Un pur Ken Loach, avec ces qualités qu'on lui connaît : réalisme quasi documentaire associé à une intrigue forte, le tout au service d'un message politique. Cela peut donner de belles choses (My name is Joe, La part des anges, Moi, Daniel Blake) lorsque Ken Loach ne verse pas dans l'un de ses travers - à mes yeux : la tendance au mélo. Là, il y cède un peu trop, avec deux scènes tire-larmes : lorsque Maya rend visite à Sam, et, surtout, cette confrontation interminable entre les deux sœurs, où on sent que Loach a voulu faire sa "scène forte". Question de goût sans doute, mais je ne marche pas pour ma part à ces scènes qui cherchent trop volontairement à émouvoir.


Autre péché mignon de Loach, dans lequel il tombe également ici : le manichéisme. Les riches sont les méchants, c'est une affaire entendue. Allez, admettons. Mais les pauvres ? Eh bien, ce sont des gentils ! Ils sont :
- sensibles (Maya pleure lorsque sa collègue, qu'elle connaît depuis quelques semaines, se fait virer)
- solidaires (sauf sa sœur, mais elle a une excuse : elle s'est prostituée pour faire vivre sa famille pendant de années : ouf, tout va bien)
- forcément chaleureux (les scènes de fêtes).
Bref : les riches sont au pire des harceleurs vicieux, au mieux des indifférents auto-satisfaits. Et les pauvres sont des gens formidables. Chacun chez soi et les vaches seront bien gardées.


Entendons-nous bien : comme la plupart des gens qui apprécient Ken Loach, j'adhère assez à ses combats. Mais j'attends précisément du cinéma, lorsqu'il ne peut m'offrir un choc esthétique (comme c'est le cas avec Loach qui ne cherche visiblement pas l'originalité formelle), qu'il remette en question ma façon de voir, qu'il décale un peu mon regard en donnant à voir la complexité des choses. Sur le même créneau, les Dardenne y parviennent parfois mieux (cf. par exemple "2 jours et une nuit). Ken Loach espère convaincre ceux qui, de toute façon, n'iront pas le voir... et son film est finalement assez consensuel vis-à-vis de son public.


Petit problème dans le scénario aussi : apparemment le film est tiré d'une histoire vraie, mais j'avoue n'avoir pas compris pourquoi Angel cédait aux revendications, alors que les manifestants étaient tous coffrés ! Il manque à mon sens quelque chose dans le film pour justifier cette victoire.


Trois notes positives pour finir tout de même : le début caméra à l'épaule, c'est un bon choix pour faire ressentir la panique du passage de frontière ; et j'ai trouvé superbe la scène où la femme de ménage qui va se faire virer refuse de dénoncer - son expression, et l'ellipse qui suit. C'est mieux quand Loach ne stabylote pas ! Enfin, il y a quelques notes d'humour - autre qualité récurrente chez Ken Loach - appréciables : la scène où Maya enferme son agresseur en lui piquant ses santiags, et celle où Sam se cache dans la poubelle de Maya.


Du Ken Loach donc, mais qui cède un peu trop à ses démons.

Jduvi
6
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le 24 nov. 2017

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Jduvi

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