Le prêcheur est dans les flammes de la bergerie

Le printemps est de retour. Il ramène avec lui du soleil, de la douceur, le changement d'heure, du pollen et un western. Un genre devenu rare et dont chaque sortie se doit d'être appréciée à sa juste valeur. Ce sera le cas avec Brimstone, une oeuvre difficile à la violence créant le malaise et à ne pas mettre devant tout les yeux, ce qui explique son interdiction de -16ans.


Le film se découpe en quatre chapitres : Révélation, Exode, Genèse et Châtiment. Sa structure n'est pas chronologique, cela créer un climat particulier en nous entraînant dans les bas fonds de l'âme humaine. Le mal a les traits du prêcheur (Guy Pearce). Il vient apporter la bonne parole dans une ville en pleine expansion. Son arrivée coïncide avec la mise au ban de Liz (Dakota Fanning), tenue pour responsable de la mort d'un nouveau né. Une jeune femme muette tremblant à la vue de cet étranger. Ils partagent un douloureux passé et c'est cette histoire que le réalisateur Martin Koolhoven va nous raconter.


Au XIX siècle, l'ouest sauvage américain accueille de nombreux migrants avec leurs différences culturelles et religieuses. Le pays va se construire sur le sang du génocide indien, mais aussi sur celui de la main d'oeuvre provenant de tout pays. Dans ce contexte de violence, l'homme se désigne comme garant de la morale en protégeant la veuve et l'orphelin. Il prend ce rôle trop à cœur et va se servir de la bible pour façonner l'esprit de ses ouailles venant écouter son prêche. La femme doit servir l'homme, en lui obéissant aveuglément. Le prêcheur est le visage de ce mâle, faisant de la femme un objet. Il interprète les préceptes religieux à sa manière, pour se donner bonne conscience et assouvir ses désirs les plus pervers. Le mal est en lui, voir le diable. Ce fou de dieu est à la poursuite de Liz, est va faire couler le sang sur sa route pour parvenir à ses fins.


La lenteur narrative du récit créait une atmosphère angoissante. On identifie rapidement le loup (Guy Pearce) et l'agneau ( Dakota Fanning). Ce combat entre le bien et le mal, est aussi celui de la femme contre l'homme. Le duel ne peut se dérouler sans violence, en tout cas pas dans ce monde-là. Elle est brutale, sanguinolente et malaisante. La femme en est la principale victime, subissant des sévices corporels et psychologiques. Elles sont en enfer et le prêcheur se révèle être un des visages du diable sur cette terre brûlée. Liz doit affronter l'homme et ses vices. Elle va en découvrir les différentes facettes durant sa fuite. Elle va être un objet de désir, avant de se retrouver vendu comme une esclave, puis usée et abusée par les miniers. La perte de son innocence sera le début d'un long calvaire, que va partager avec difficulté le spectateur.


Le regard de Dakota Fanning, puis d'Emilia Jones est intense. Elles ont une force de caractère qui va leur permettre d'avancer malgré l'adversité. Guy Pearce est le principal adversaire, celui qui sème le chaos partout ou il se trouve. Les flammes de l'enfer danse dans ses yeux. Il n'a pas une once d'humanité et son visage est marqué par sa haine. Le duel est aussi intense qu'éprouvant. Le film transpire la violence et ne va pas nous épargner les faits. La caméra de Martin Koolhoven ne montre pas toutes les exactions subies par ses protagonistes. Elles sont parfois hors-cadre, ce qui les rend encore plus insupportable. Une gifle assénée à une femme par un homme, a souvent plus d'impact qu'un duel à l'arme à feu. La peur est constante, on la ressent à chaque image, en espérant que la fin va abréger nos souffrances et celles de cette femme.


C'est un western particulier qui divise en ne laissant pas indifférent. La femme est souvent reléguée au second plan dans ce genre de films. Elle va retrouver le devant de la scène, non sans être maltraitée, mais n'était-ce pas le cas à cette époque? Depuis, le monde a évolué, tout comme les manières de garder la femme sous le joug de l'homme. Le film peut se dérouler de nos jours, les fous de dieu sévissent toujours en interprétant la religion selon leurs intérêts et surtout celui leur permettant de garder le pouvoir sur elles.

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le 28 mars 2017

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Laurent Doe

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