Une mélancolie tenace irrigue ce film, où la mort, le désespoir et la solitude règnent en silence. Enracinées dans la terre, la campagne et le monde paysan, les trois générations de la famille de Nicolas — comme frappées d'une malédiction — luttent contre ces fléaux, tandis que d’autres, plus chanceux ou plus opportunistes, semblent portés par une vie qui leur sourit et s’écoule naturellement.
Mais Nicolas, lui, a besoin qu’on lui explique ce qu’est la vie, comme le suggère explicitement le titre. C’est une question de transmission : de savoir-faire, de valeurs, de responsabilités. Il doit prendre femme, aider les vaches à mettre bas, trouver sa propre voie, gagner sa vie, gérer son argent — en somme, devenir un homme. Or rien de cela ne lui est familier : il semble étranger au langage des femmes, n’a jamais vraiment travaillé à la ferme, et n’a encore jamais eu d’argent à lui.
Visuellement, le film opte pour un filtre de couleur rapidement pesant, qui atténue la beauté des plans panoramiques sur la nature. Cette esthétique, rappelant parfois La Double Vie de Véronique de Kieślowski, accentue la lassitude, la nostalgie et le désespoir latent des personnages, même dans les rares moments de joie. Ce choix contribue à l’ambiance mélancolique, mais finit par appesantir le récit.
Malheureusement, C’est quoi la vie ? souffre aussi d’un rythme inégal, de dialogues souvent plats, de personnages assez stéréotypés et d’un jeu d’acteurs globalement fade — à l’exception notable de J. Dufilho, bouleversant de justesse, et dont la présence m’a d’ailleurs amené à découvrir ce film.
Ce film modeste, malgré ses maladresses, tente de capter quelque chose d’essentiel et de fragile : la difficulté de vivre quand le sens semble se dérober. Si la mise en scène manque parfois de souffle, elle laisse tout de même affleurer une vérité poignante sur le monde paysan en mutation, et sur ces existences discrètes que la modernité laisse trop souvent derrière elle.