"Adilkhan Yerzhanov est plus que jamais chez lui à L’Étrange Festival, et le prouve une fois encore avec Cadet, conte horrifique où les fantômes du Kazakhstan continuent de hanter les vivants – enfants compris – jusqu’à les métamorphoser en monstres ou en bourreaux. Et pour mieux entretenir cette spirale de violence, rien de tel que le soutien de conservateurs fascisants, garants d’un ordre moral prêt à broyer toute individualité. Cadet, c’est un peu Shining à la sauce kazakhe, où la terreur ne vient pas d’un lieu figé dans le temps, mais d’un pays figé dans son passé."
"Cette fois, il opère un virage vers le thriller surnaturel pur, jouant avec la photographie sombre et glacée, et une mise en scène aux cadres souvent fixes, mais qui piègent les personnages aux marges de l’image. L’espace autour d’eux devient une menace latente, prêt à les aspirer dans l’obscurité. Le décor, ici une école militaire sinistre, est aussi soigné que dérangeant. Yerzhanov le travestit intelligemment, sculptant des zones d’ombre à l’arrière-plan qui forcent le spectateur à scruter, deviner, anticiper. La menace, chez lui, vient autant du champ et du hors-champ, et rien n’est laissé au hasard."
"Yerzhanov convoque ici les fantômes de Kiyoshi Kurosawa (Kaïro, Cure), mais c’est surtout le travail de déconstruction des frontières entre réel et imaginaire, à la manière de David Lynch, qui glace le sang. Le film nous entraîne dans les entrailles d’un bâtiment labyrinthique, où chaque recoin semble cacher un secret, un crime, une honte. Les forces du mal prennent différentes formes, mais toutes s’abreuvent de la fragilité de Serik, perpétuant une masculinité violente dans un système incapable de se remettre en question. Ce n’est pas un thème nouveau chez Yerzhanov, qui en profite pour tourner en dérision la bureaucratie kazakhe, engluée dans un déni absurde et tragique. Chaque séquence devient ainsi une critique, grinçante mais lucide, d’un pays hanté par ceux qu’il a voulu effacer."
"Nul besoin d’être familier avec l’univers de Yerzhanov pour être happé. Le film s’impose d’emblée par sa singularité et sa maîtrise. S’il souffre de quelques longueurs, elles participent à installer une tension poisseuse, quasi suffocante. Bien qu’il s’agisse de sa première véritable incursion dans l’horreur, Yerzhanov s’empare du genre avec une froideur clinique et une précision redoutable. Le résultat est captivant, dérangeant, et profondément bouleversant."
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