Des serpents dans... partout. Des serpents partout.

Des films de terreur animale et de monstres divers, j'en ai vu pléthore, cinéma montrant allègrement de manière plus ou moins subtile une nature lassée de nos agissements inconscients soudainement se déchaîner à l'aide de requins géants, d'armées de mygales, de moutons carnivores, de reptiles antédiluviens, de grenouilles rebelles ou encore de primates bourrus. Un thème devenu depuis belle lurette, je pense pouvoir l'affirmer sans trop étonner, mon genre de prédilection.

Aujourd'hui, je n'attends plus grand chose de cette branche de la série B, pensant avoir vu la principale partie de ce qui en constitue les neiges éternelles, je me laisse tout au plus alpaguer par un film de requins en supermarché ou une invasion post-apocalyptique de rats mutants, sans plus d'espoir de trouver ici le moyen plaisant et insouciant de dépenser 1h30 de mon temps.
Et pourtant, rien ne m'avait préparé à ça. (oui je sais, ça fait slogan sur-usé de gros film d'horreur actuel bien pompeux, mais c'était trop tentant)

Lors des premières minutes, après un générique dégoulinant au bord du gerbeux dans un hypnotisme digne des yeux de Kaa et qu'il serait vain ici de tenter de vraiment expliquer, j'avoue que je me laissais aller à me demander ce qui provoquait un tel enthousiasme chez mes rares éclaireurs l'ayant vu, l'ami @drélium en tête à qui je dois cette fameuse découverte. Serait-ce uniquement son côté asiatique, conférant au métrage une dimension exotique attrayante bien que fortement conventionnel et proche du nanardesque dans son ensemble ? Je m'apprêtais déjà à l'amère déception. Et, je dois l'avouer, ce n'est pas la scène d'intro apte à soulever bien des coeurs sensibles, montrant un véritable massacre hystérique de reptiles à coups de pelle et autres instruments massifs décapitant et écrasant les animaux entortillés qui m'a fait déchanter de cette position un brin septique.

Nan, c'est après que tu t'aperçois que tu es devant un film de malade. Autant le dire clairement, les serpents ne me font ni chaud ni froid, et si ma fascination éprouvée pour les araignées se mêle à un léger sentiment de terreur succulent qui peut provoquer facilement des sursauts de grattouillement devant un métrage, voir du serpent en masse me laisse tout à fait de marbre, bien que réellement attiré par la beauté écailleuse de l'animal. Mais là, c'est juste irrésistible.

Il y aurait tant de choses à dire pour si peu au final... Après une scène d'intro de travaux publics rappelant non sans ressentiment le généreux mais bien trop timide "Ants", puis quelques plans crus d'éviscérations reptiliennes, on comprend vite qu'on aura le droit à un soulèvement serpentin face au genre humain avide et destructeur. Et ça ne tarde pas.
Les morts et disparitions commencent à s'accumuler dans quelque chose d'on ne peut plus classique pour le genre, dans une mise en scène habituelle et sans audace... jusqu'à ce que..

Jusqu'à ce qu'un type se fasse happer par un monstre ondulant large comme une roue de bagnole. Et là tu te dis que le truc que tu mates te réserve surement quelques surprises encore.
La scène qui ne tardera pas à suivre est, je pense, ce qui fait directement basculer dans le côté obscur de ce film, le moment ou tu te dis que c'est diablement dénué de toute retenue, et que tu es vraiment entrain de mater un truc auquel le cinéma occidental ne t'avait pas vraiment habitué. Et que t'as absolument pas envie d'arrêter.
Un "maître des serpents" est appelé à la rescousse, apparaissant assis, recouvert de dizaines de reptiles tapissant son buste et grouillant sur son corps entier. On le prie de bien vouloir se rendre sur les lieux des dernières atrocités, affronter le boa destructeur qui semble le roi de cette armée grincheuse. Sans plus de palabres, il accepte. Pas d'argent, c'est son devoir. Il part alors sur les traces titanesques de l'animal, énorme sillon gravé dans le sol sableux, sous une musique au synthé proche d'un air rejeté par Carpenter. Ça y est, à ce moment t'es pris dans le filet et totalement hypnotisé.
Le "maître des serpents" se retrouve dans un obscure baraquement de bois branlant, entrant dans l'entre de la bête avec une assurance friable. Et le combat débute. Il commence par repousser les attaques de "soldats" serpents par de bons coups de tatanes dans leurs gueules avant d'engager le face à face homérique avec le gigantesque monstre d'écailles et... et t'as presque le droit à un combat câblé entre un type et un serpent déchaîné volant dans les airs sous des bruits synthétiques telles les épées de "Zu : Les Guerriers de la Montagne Magique".. t'imagines ou pas ? Nan ? Regarde le film. J'en dirais pas plus là dessus, si ce n'est qu'après un combat acharné, l'animal gargantuesque est tué et le maître éreinté, entrain de s'effondrer.. C'est juste dément. Et honnêtement, assez génial.

T'as pas le temps de te remettre du truc que déjà t'as l'apparition d'un second "boa" destructeur et que le gros des serpents prépare son entrée en grouillant sec. L'ensemble du film étant bâtis, tu t'en aperçois maintenant, dans un crescendo brusque, par saccades et relativement inattendu par rapport à ses bancals débuts, la scène de fin s'apprête tranquillement à te montrer ce qui tient de la folie filmique pure. Je ne peux qu'imaginer comment un herpétophobe qui pense qu'Anaconda est la pire oeuvre cinématographique réalisée dans cet univers réagirait devant ce film, mais nul doute qu'il se serait, dès les premières secondes de la scène finale, enfermé dans un bunker de béton armé avec une dizaine de tanks tout autour.
Ce sont des centaines de serpents qui déboulent en masse dans un hôtel, grouillants les uns sur les autres dans les couloirs, défonçant les portes dans des amas suintants et noueux, recouvrant d'un tapis mouvant les voitures pour becter leurs occupants, s’entremêlant de manière démoniaque sur le sol, se faisant le temps d'une crise de démence, l'énorme cuir chevelu de Méduse, se tortillant sur les corps agités de soubresauts de leurs infortunées victimes dans des cris tétanisés et de généreux geysers d'hémoglobine bien baveux, le tout culminant vers un final dans les flammes ou le Roi Boa vient chercher son dû en chuintant, sa proie pétrifiée de terreur qui jadis avait ordonné le massacre des siens.

Un film qui pourrait vite sombrer dans le nanar de haut vol avec un doublage miteux, mais ce serait ne pas rendre hommage à cette démence absurde qui suinte de chaque minute de cette oeuvre improbable, du combat tourbillonnant humain-bêtes au dressage d'opossums tueurs de reptiles en passant par "des serpents dans la baignoire" ou visitant les jupes de madame, non, ce serait injuste de limiter ce bijou à ça... A recommander sans hésiter à tous les accrocs au genre animal rancunier. A déconseiller d'urgence à tous les phobiques de serpents qui ont un jour parié être capable de regarder Anaconda 3 sans broncher... ce film vous fera du mal....

(malgré tout, je me laisserai aller à préciser que rien de tout ça, pas une seconde du film ne justifie le massacre réellement montré de dizaines de reptiles... Ouais, j'suis un amoureux des bêtes, c't'ainsi)
zombiraptor

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