J'avais beaucoup de craintes avant d'aller voir ce Captain America, dont celle de me retrouver devant un produit patriotique à la républicaine, comme seuls en sont capables les Américains. En fait la farce est toute autre, et même s'ils sont les gentils, certaines métaphores et critiques subtiles sont planquées par ci par là. Le drapeau étoilé orne le bouclier du Capitaine, mais la première fois qu'il usera d'un bouclier, ce sera un couvercle de poubelle; volontaire, ou non ? Lors d'une démonstration d'une voiture censée représenter le futur de l'automobile américaine, elle se vautre lamentablement, tout comme leur industrie (General Motors), il y a peu. On pourrait penser à de simples coïncidences, mais pourtant, quand l'histoire se développe, on voit que c'est trop bien écrit pour que ça en soient, notre personnage, Steve Rogers (Chris Evans), étant démesurément émouvant, et secondé par un Stanley Tucci excellent, ainsi qu'un Tommy Lee Jones en pleine forme. Puis ensuite, notre jeune ami entre dans son sarcophage censé décupler sa force, et si c'est bien ce qu'il se passe, l'oeuvre perd quant à elle immédiatement tout son intérêt. Les scènes d'actions se suivent et se ressemblent, divertissant un minimum, mais ne laissant rien d'inoubliable, à l'inverse d'Iron Man, Thor ou encore le dernier X-Men. On regrettera aussi qu'Hugo Weaving campe une nouvelle fois un homme « sans visage », et qui plus est manquant grandement de charisme, étant très loin de Kevin Bacon dans First Class ou Mickey Rourke dans Iron Man 2.
Bref, Captain America est un film décevant, principalement à cause du fossé gigantesque qui sépare le niveau de ses deux parties. Les scénaristes se sont arrachés les cheveux pour en faire un produit exportable, et transformer notre Captain America en « Captain World », mais à trop travailler sur la forme, ils en ont oublier le fond. X-Men suintait le patriotisme, tout comme Iron Man, mais ils ont gravé dans notre mémoire des moments d'anthologie, ce que ne fait pas ce Captain America. L'intérêt des comics repose presque toujours sur la dualité des identités d'une même personne, et bien que l'on ait reproché à la plupart des productions de ne mettre l'accent que sur le spectaculaire, et louper l'aspect humain, Captain America réussit l'inverse, nous servir un VRAI héros, squelettique autant qu'il est attachant, puis ensuite un type bodybuildé doté de pouvoirs, qui lui est en revanche aussi chiant qu'une convention sur l'hygiène bucco-dentaire. On a tous rêvé un jour de devenir un super-héros, mais volontairement ou non, Captain America nous donne l'envie de rester nous-même, ce qui dans le fond, serait presque louable.
Pour conclure, les amateurs de super-héros sur grand écran auront probablement ce qu'ils recherchent. Ceux qui n'adhèrent que peu au genre ou qui ont des appréhensions seront surpris par la tournure assez inattendue que prendra la narration, surtout que le duo chargé de l'écriture est le même que celui de Narnia.
Mention spéciale pour Chris Evans, qui pour une fois, sait tenir un rôle, et qui s'en sort bien mieux sans ses muscles. Ne seraient-ce finalement pas eux qui l'auraient handicapé jusqu'ici dans la comédie ?