La parodie de l’univers James Bond atteint, dans Casino Royale, un point de non-retour au-delà duquel la subversion des codes quitte le domaine du pastiche pour s’autosuffire et former un espace de jeu infini. L’entrée pêle-mêle des espions, des cowboys et des Indiens dans le casino avant l’implosion de ce dernier expose de façon claire l’ambition de l’équipe de réalisation : revisiter l’agent 007 par le prisme de l’outrance et de la surenchère permanente. L’intrigue, d’abord bavarde comme le sont les interludes entre deux séquences d’action, tend à s’affranchir de toute cohérence interne pour butiner les références qui quittent aussitôt leur artificialité et nourrissent un vaste feu d’artifices.


La sensualité mute en drague lourdingue, l’érotisme en une consommation frénétique et drolatique de corps interchangeables ; le summum étant atteint lors de la session d’entraînement qui doit conduire une recrue à résister aux séductions de la gent féminine. Plus le long métrage avance et plus il devient psychédélique, adoptant en principe de composition narrative une esthétique de la seconde moitié des années 60 ; cette gradation dans le n’importe quoi, qui réussit cependant à créer sa propre lisibilité à partir de son sens déraisonné de la logique, exploite sans vergogne la patte Blake Edwards sans jamais atteindre ni sa finesse ni sa grâce.


Voilà ce qui manque, en somme, à Casino Royale : une capacité à réinventer un charme et à tirer profit du dynamitage des codes et des conventions du film d’espionnage pour offrir à ce dernier une alternative burlesque pérenne. Reste un divertissement explosif et unique en son genre, porté par des prestations d’acteurs mémorables.

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le 8 juil. 2021

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