Après avoir été étudiant Erasmus à Barcelone dans « L’auberge espagnole » (2002), puis écrivain débutant (scénario d’une mini-série TV à l’eau de rose) à Londres et Saint-Pétersburg dans « Les poupées russes » (2005), Xavier le personnage fétiche de Cédric Klapisch va poser ses valises à New York. Il a maintenant 40 ans, marié et père de deux jeunes enfants, la mère étant Wendy (Kelly Reilly) toujours charmante, même si son côté british ressort de manière peu avantageuse quand elle affiche son mécontentement.

Xavier vieillit plutôt bien (le ventre incroyablement plat de Romain Duris) et il reste élégant même lorsqu’il court, mais il est toujours aussi dispersé. Il regrette que sa vie ne soit pas une belle ligne droite allant d’un point A à un point B. Il estime sa vie plus compliquée que celle des autres, alors qu’elle est tout aussi difficile pour ses ami(e)s. Il se retrouve à New York à la suite d’un malheureux enchainement de circonstances. En fait, Xavier c’est le type assez sympa qui ne sait pas dire non. Ensuite, il déplore certaines réactions !

Cédric Klapisch prouve encore une fois qu’il est à l’aise avec l’air du temps. Il aborde sans le moindre complexe des thèmes comme la crise de la quarantaine, les séparations sentimentales avec leurs conséquences familiales, les familles recomposées, le brassage ethnique favorisé par les voyages, l’envie de procréation des homosexuels (en particulier les femmes), le mariage blanc, la fécondation in-vitro, la fascination pour les Etats-Unis et en particulier la ville de New York (où on devient assez facilement chauffeur de taxi, ce qui vaut quelques surprises à ceux qui imaginent que les rues sont toutes parallèles, perpendiculaires et numérotées régulièrement), etc.

Tout cela fonctionne plutôt bien, mais Klapisch se contente d’effleurer tous ces thèmes, parce qu’il filme une comédie. C’est donc léger, sympa et on s’amuse à l’occasion, parce que c’est vrai qu’on apprécie de retrouver Xavier ainsi qu’Isabelle (Cécile de France) et Martine (Audrey Tautou). Mention très bien à Cécile de France qui se régale visiblement dans son rôle de lesbienne. Bref, c’est coloré et ça bouge pendant près de 2 heures. Xavier est typique de sa génération, quelqu’un qui profite des opportunités, qui sait se rendre disponible pour ses amis et qui fait son possible pour se débattre avec les aléas de la vie.

Klapisch se montre à l’aise pour dynamiser son film avec des trouvailles de mise en scène (voir le générique de début que j’ai trouvé très réussi) qui agrémentent un film consensuel. Il se joue des unités de temps et de lieu. Par contre, je l’ai trouvé plus à l’aise sur des détails amusants qu’au moment où il finit par faire se télescoper les petites histoires des personnages principaux. Une sorte de bouquet final où j’ai trouvé qu’il en faisait trop.

Xavier est désormais écrivain. Il est bien dans l’air du temps avec, perpétuellement à portée de la main, son smartphone ainsi que son ordinateur portable à la marque bien reconnaissable qui lui permet de communiquer avec son éditeur via Skype. Xavier fait évidemment dans l’auto-fiction (encore une tendance forte), puisque ses précédents romans s’intitulent… « L’auberge espagnole » et « Les poupées russes » (Klapisch tendance Lelouch). Cela colle bien avec le fil narratif utilisé depuis « L’auberge espagnole » Xavier racontant sa vie en voix off. Martine est emballée, soit. Mais… tant qu’on y est, pourquoi pas le prix Nobel vers 80 ans ? C’est l’éditeur de Xavier qui se frotterait les mains.

Dominique Besnehard joue cet éditeur réaliste à tendance cynique qui pousse Xavier à écrire, lui donne des avis sans concession. Dominique Besnehard est quelqu’un qui connaît les acteurs comme personne, puisqu’il est agent d’un certain nombre d’entre eux depuis plusieurs dizaines d’années. De temps en temps, il « rend service » en jouant un petit rôle, toujours dans le même genre. Ici, il déplore le happy end très conventionnel, rappelant que c’est le drame qui fait vendre. Très astucieux de la part de Klapisch qui a son happy end (soulagement de la majorité des spectateurs), tout en présentant un bouc-émissaire pour toutes les avanies subies par les personnages du film. Dominique Besnehard n’a pas un physique avantageux, il est maniéré (façon Guillaume Gallienne), il le sait et s’amuse à en jouer. Voilà, j’apprécie cet homme de l’ombre qui sait faire dans l’auto-dérision. Une fois de plus, il endosse un rôle ingrat de manière savoureuse.
Electron
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Vus au ciné en 2013

Créée

le 3 déc. 2013

Critique lue 2.9K fois

49 j'aime

14 commentaires

Electron

Écrit par

Critique lue 2.9K fois

49
14

D'autres avis sur Casse-tête chinois

Casse-tête chinois
PatrickBraganti
3

Un parisien en Amérique

Inconsistant et nombriliste, à peu près vide en matière de scénario, quelques idées de mise en scène qui lorgnent du côté de Michel Gondry (gadgets et incrustations dans l'écran) et une avalanche de...

le 5 déc. 2013

31 j'aime

6

Casse-tête chinois
Rachel_Youya
6

Casse-tête irrésolvable

Je tourne et retourne dans tous les sens dans mon appartement. Décidément ça ne vient pas. Et c'est avec la B.O de l*'Auberge Espagnole* que l'inspiration me vient : nostalgie ? C'est exactement la...

le 13 nov. 2013

27 j'aime

3

Casse-tête chinois
pphf
6

Cap sur Boboland ?

Peut-être la prochaine destination de Xavier Rousseau, à moins qu’il n’y soit déjà arrivé avec ces tribulations d'un Chinois à New York. On conçoit que le film puisse exaspérer – toujours la même...

Par

le 9 juin 2015

22 j'aime

Du même critique

Un jour sans fin
Electron
8

Parce qu’elle le vaut bien

Phil Connors (Bill Murray) est présentateur météo à la télévision de Pittsburgh. Se prenant pour une vedette, il rechigne à couvrir encore une fois le jour de la marmotte à Punxsutawney, charmante...

le 26 juin 2013

111 j'aime

31

Vivarium
Electron
7

Vol dans un nid de coucou

L’introduction (pendant le générique) est très annonciatrice du film, avec ce petit du coucou, éclos dans le nid d’une autre espèce et qui finit par en expulser les petits des légitimes...

le 6 nov. 2019

78 j'aime

4

Quai d'Orsay
Electron
8

OTAN en emporte le vent

L’avant-première en présence de Bertrand Tavernier fut un régal. Le débat a mis en évidence sa connaissance encyclopédique du cinéma (son Anthologie du cinéma américain est une référence). Une...

le 5 nov. 2013

78 j'aime

20