Bourrage des urnes
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Le thème est convaincant quand on lit le synopsis : la manipulation politique, l'utilisation purement intéressée d'une infirmière très dévouée à ses patients par un parti extrémiste. Grand et vaste sujet de société duquel il est toujours intéressant et important de parler. Faut-il encore bien savoir doser la manière dont on le fait, ce qui n'est à mes yeux, pas vraiment le cas dans Chez Nous.
Après Pas son genre, il s'agit de la deuxième collaboration entre Emilie Dequenne et Lucas Belvaux, le réalisateur ; et il n'y a pas à dire, on préfère la première. Si l'actrice n'est pas décevante avec un naturel et une spontanéité qui séduisent toujours, la réalisation et la mise en scène manquent de réalisme pour nous convaincre. On sent quelques hésitations de la part de Belvaux sur ce qu'il est en train de faire et de montrer. Je crois que quand on dénonce, il faut oser y aller franchement et ne pas faire quelque chose qui se rapproche de la réalité mais qui la décrit et l'accuse véritablement. Belvaux s'engage contre la manipulation politique tout d'abord, que tous les partis ou presque utilisent mais aussi contre l'extrême droite et c'est là qu'il fait quelques erreurs. Le réalisateur fait quelques détours et camouflent sa dénonciation à travers des noms qui ne signifient plus grand chose et qui rendent le ton plus neutre alors que le propos du film ne l'est clairement pas. Comme s'il voulait cacher ce qu'il dit alors que c'est très net. Cet excès de patriotisme nous fait mal aux yeux comme en réalité mais le film ne va jamais en profondeur. Comme à chaque fois qu'il s'agit du Front National, on ne se pose jamais les bonnes questions, on voit seulement ce qu'il y a en surface. Le film ne propose pas de réflexion sur des idées, il suit le principe très manichéen de l'opposition entre le bien et le mal, comme si la politique se réduisait à ça. Je ne vais pas vous apprendre que tout est bien plus compliqué que ça. Loin, très loin de moi l'idée de défendre le FN, jamais, mais il est clair que le film caricature le parti d'une manière très maladroite et peu crédible alors que ça aurait justement mérité un traitement bien plus coup de poing pour réveiller les foules en pleine période de présidentielle.
Belvaux complexifie ce qui est secondaire et fait des raccourcis et d'énormes clichés sur ce qu'il y a d'important dans le film, si bien que l'on finit par se perdre un peu entre le propos central et tout ce qui l'entoure. Guillaume Gouis se glisse dans la peau d'un néo-nazi et est très bon malgré son personnage trop chargé qui finit par détourner un peu le film de son idée générale et nous perdre en même temps. Certains rôles secondaires, comme celui-ci auraient mérité d'être plus travaillé ou d'une manière différente pour éviter ce mélange de problématiques qui dessert totalement le film alors qu'elles sont toutes intéressantes. Mais la superficialité ne s'arrête pas aux multiples clichés puisque beaucoup de scènes sont surjouées et foncent tout droit vers la facilité. Voir Catherine Jacob avec sa perruque blonde devient vite insupportable et les regards zombiesque des fidèles pendant le meeting transforme le parti en secte.
L'idée reste pourtant bonne et efficace malgré tout car le réalisateur nous rappelle l'influence et la manipulation dont les politiques font usage. La volonté et la tentative sont à saluer malgré quelques défauts à corriger qui nous font passer à côté du film.
Créée
le 17 mars 2017
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