Car il y a toujours eu et il y aura toujours des surprises qui me feront me dire que je ne lâcherais jamais le cinéma, cette année est l’année de ma découverte d’un acteur, d’un personnage, d’un univers, d'un vrai chien...
Si chien de la casse de loin s’apparentait à un films dans un coin paumé nous faisant suivre des personnages encore plus perdus, il a su surprendre le public en sortant de sa case naturaliste galvaudée en tirant très fort la sonnette des émotions et met en exergue un thème universel qui sera déconstruit par la suite : l'amitié.
On y découvre trois personnages, Miralès, Dog et Malabar. Trois chiens dans des sens qui diffèrent. Le dernier dans son sens littéral, le second, le bon toutou, suiveur et docile qui se fait punir par son maître quand il n’est pas assez obéissant, et le premier, le bâtard, celui que l’on utilise comme une insulte, celui qui ne respecte rien et surtout pas les autres.
Cette notion du chien est très importante au-delà d’être le titre du film, elle symbolise un attachement toxique, ’une amitié forte mais branlante qui n’avait besoin que d’un déclencheur pour voler en éclat, et qui ne pourra être réparée qu'en sortant de ce carcan dégradant.
Cette instabilité, c’est Miralès qui la prodigue. Surprenant par son phrasé, déstabilisant par son égoïsme. Poète et dealer, incapable de résoudre sa propre inanité que par la moquerie et la complainte, parlant d’amour sans le pratiquer, parlant d’ambition sans la mettre en oeuvre. Et pourtant… En déclarant ces ignominies, je ne peux m’empêcher de me dire que ce n’est pas le Miralès que j’ai côtoyé pendant ce film. Certes cassant, toxique, mais majestueux, et paradoxalement bienveillant, prêt à tout pour aider ses proches.
Cette dualité elle a un nom, c’est Raphaël Quenard, mon plus gros coup de cœur de cette année. Une façon de parler unique, une gueule à la lisière entre un paumé rêveur et un Alain Delon du 21ème siècle, un jeu… Hypnotique de sincérité, jonglant avec son panel d'émotions pour nous ramener à l’essence de ce qu’est le cinéma. Je ne sais pas s’il aura un césar l’an prochain, mais dans la tête de tout le monde c’est lui le véritable coup d’éclat de 2023.
Chien de la casse est et restera mon film français de cette année. Bien qu’il ne peut se targuer d’être aussi chirurgical qu’un Anatomie d’une Chute, la mise en scène de Jean-Baptiste Durand et surtout son sens du cadrage font qu’on est contraint de reconnaître sa force iconique, la puissance de son image. Ses plans larges dans le désert campagnard, scellant la conditions des personnages, ou bien ses champs / contre champs subtils instaurant dès les prémisses cette notion d’inégalité relationnelle et les tensions à venir.
Démontrant une fois encore que le cinéma, même avec peu de moyen, peut toucher bien plus si les personnes travaillant dessus déploient tout leur savoir-faire au service d’une histoire, d’une idée.