____________________________Spoilers en tout genre..._______________________________


Cette critique fait partie de la liste "John Carpenter: The Prince of Darkness" et "Un livre, un film".
https://www.senscritique.com/liste/John_Carpenter_The_Prince_of_Darkness/1608951
https://www.senscritique.com/liste/Un_livre_un_film/1500234


Roman: Stephen King Titre original: Christine, paru en Avril 1983.
Adaptation:Bill Phillips


Fidélité d'adaptation : 75% environ


Qualité d'adaptation : 95%


                                                         **Différence entre le roman et le film :**

Les personnages :


Arnie Cunningham: (Keith Gordon): d’acnéique, le visage d'Arnie devient bien moins "ravagé" dans le film. Sinon, pas d'autres changements notables.


Dennis Gilder: (John Stockwell), pas de changement notable.


Leigh Cabot: (Alexandra Paul), si ce n'est qu'Alexandra semble plus filiforme que son avatar romanesque, pas d'autre changement notable.


Will Darnell: (Robert Prosky), pas de changement notable.


Buddy Repperton: (William Ostrander), d'un visage brut et sans charme, on passe à une incarnation ciné moins caricaturale. Pas d'autre changement notable.


Lieutenant Rudy Jenkins (Harry Dean Stanton), pas de changement particulier.


Roland LeBay devient George LeBay (Robert Blossom), pas de changement notable.


Christine: d'une Plymouth Fury III berline (soit une 4 portes), on passe à une version Coupé dans le film.


L'histoire:


Le plus gros changement intervient dans le fait que le cadavre de Roland LeBay et des autres victimes de Christine (King appréciant beaucoup de parsemer ses œuvres de morts-vivants déliquescents) n'est pas repris dans l'adaptation ciné (ce qui a mon sens est une plus-value).
En effet, la Christine dépeint dans le film de Carpenter reste plus mystérieuse et plus "vivante", car autonome. Ce qui en fait donc un objet doté d'une certaine conscience, voire d'une réalité plus tangible dans ses actes (et non pas conduite par un zombie quelconque).


Le script de Phillips s'attarde donc plus sur la psychologie et la métamorphose du jeune Arnold, passant ainsi du vilain petit canard apeuré à un jeune homme froid et obstiné.
Débarrassée des oripeaux "horreur zombiesque" du roman, la version ciné devient une chronique sur l'adolescence ordinaire dans un monde ordinaire, avec juste le zeste de fantastique impliquant l'âme mécanique de Christine.


Les morts multiples des protagonistes, diffèrent assez du roman au film:


-ainsi la première victime de Christine en 1978 (Moochie Welch dans les 2 versions) aperçoit Christine garée le long d'un trottoir, puis celle-ci le renverse puis l'écrase (voire le piétine) plusieurs fois, alors que dans le film, celle-ci est cachée dans l'ombre d'un recoin puis avance lentement vers Moochie.
Celui-ci se met alors à courir puis escalade un portail d'une usine et court se réfugier dans un passage étroit. Christine le talonne, fonce dans le portail puis force le passage (moins large d'une quarantaine de cm) et se compresse pour enfin atteindre Moochie et l'écraser contre le mur,


-Buddy Repperton, Richie Trelawney et Bobby Stanton (Don Vanderberg dans le film), auront des destinées bien distinctes: là où dans le roman, les trois gars partent en virée dans la nuit enneigée et sont poursuivies par Christine (qui leur fera quitter la route et où Richie et Bobby mourront dans le crash, tandis que Buddy se fera écharper par la Plymouth -juste après que le zombie LeBay le toise du haut d'un promontoire- Repperton mourra de ses blessures), tandis que chez Carpenter, tout commence par la même course-poursuite qui prend fin à la station-service où travaille Don. Les jeunes sortiront de la voiture pour provoquer Arnie, mais Christine foncera dans le local ( Don et Richie mourront dans l'explosion de la station) et Repperton s'enfuira en courant sur la route, poursuivit par une Christine en flammes...qui passera sur le corps de Buddy qui s'enflamme au contact de la Plymouth.
-Dans le livre, Don se fera simplement écrasé par Christine, à l'extérieur de la station-service. Toujours dans le roman, Sandy Galton (le gardien du parking de l'aéroport), mourra 4 ans plus tard dans la cabine d'un drive-in.
-Will Darnell périra dans l'assaut de Christine contre sa propre maison, tandis que dans le film, il se mettra au volant de la Plymouth et finira asphyxié lorsque le siège le comprimera inexorablement contre le volant.
-Arnie finira sa vie dans la voiture de sa mère (voir ci-dessous), tandis qu'il meurt éjecté de sa Christine, dans le film.
-Dans le bouquin, le Lieutenant Jenkins ( sa voiture est précipitée contre un mur) et les parents d'Arnie trépassent aussi (l'un meurt asphyxié dans la Plymouth, l'autre est victime d'un "accident" en compagnie d'Arnie et du zombie de LeBay).


On remarquera donc que les morts visibles à l'écran sont plus visuelles et concises (de plus magnifiées par la vision et la musique de Carpenter), bien que moins nombreuses.


D'autres différences subtiles émaillent les versions papiers et ciné:
-Carpenter débute son film avec une scène crée de toute pièce, où l'on voit la Plymouth sur sa chaine de montage, faisant sa première victime dès sa naissance: ce sera un ouvrier qui aura négligemment laissé tomber sa cendre sur la housse du siège passager (un manque de respect aux "yeux" de Christine),
-l'apparition de Leigh se fait discrète et plus tardivement dans le roman, là où ça devient un "évènement" dans le film (pensez-donc, une nouvelle élève pleine de charme dans un lycée...),
-la tentative de Dennis pour sortir avec Leigh dans la bibliothèque, n'existe pas dans le roman,
-la rixe entre Arnie et Repperton (une première bagarre sert de prémisse) se localise non loin du stade (roman) et dans l'atelier mécanique (film),
-l'achat de Christine chez LeBay se fait en deux visites (premier évènement dans le roman, par ailleurs) mais en une seule dans le film,
-l'immatriculation de Christine est HY-6241-J dans l’État de Pensylvannie (roman) et devient CQB-241 dans l’État de Californie (film),
-le "massacre" de Christine se déroule dans le parking de l'aéroport,où le père d'Arnie conseille de garer la Plymouth (dans le roman) et dans l'entrepôt de chez Darnell dans le film,
-le procédé d'auto-réparation de Christine diffère aussi: dans le livre, Arnie pousse l'épave et celle-ci se remodèle au fur et à mesure, alors que dans le film, celui-ci lui demande juste "show me" et Christine d'accéder à sa requête dans une scène excellente (avec le morceau Harlem Nocturne en illustration musicale, repris plus tard comme générique de la série "Mike Hammer"),
-la scène où Leigh s'étouffe avec un hamburger se passe sur la route (dans le roman) et dans le parking d'un drive-in dans le film, de fait le gars qui lui porte secours passe d'autostoppeur (livre) à spectateur (film),
-la première apparition de Christine durant le match de foot voit celle-ci en moyen état (livre) à quasi flambant neuve (film),
-l'accident sportif de Dennis se passe après la première apparition de Christine au stade (roman), alors que ça arrive en même temps dans le film,
-dans le roman, Arnie se fera arrêter par la police pour transport de contrebande (en lien avec les activités illicites de Darnell), cet élément disparaitra pour le film,
-et enfin, la mort de Christine changera quelque peu, du fait de l'apparition du zombie-LeBay, ainsi que des fantômes de sa femme et sa fille. Dennis se servira pour cela d'un camion rose (!) à vider les fosses sceptique (roman) et d'un bulldozer (film).


Le film:


Oui, pour moi Christine est avant tout une sombre et tragique romance. D'où le fait de ne pas le classer en tant que film d'horreur, puisque ce n'en est pas un.
Après tout, il n'est que question de l'amour que porte Arnie (et ce, dès le premier coup d’œil) à cette Plymouth Fury '58, surnommée affectueusement "Christine" par son précédent propriétaire, le frère de George LeBay soit Roland dans le film, mais inversement dans le roman, vous suivez?).
Et une fois Arnie au volant, Christine ne fait pas montre de jalousie envers quiconque se montre affectueux à l'encontre d'Arnie?
C'est ce qu'on appelle un Amour Passion.
Un Amour Exclusif.
Un amour Destructeur...


Donc, cette adaptation parfaite du roman de King, ne parle que d'amour.
Il y est aussi question de sexe, mais c'est secondaire. Arnie lui-même ne semble pas intéressé énormément par ce concept primaire.
Tout tourne autour de cette relation très particulière. Le reste n'est que les conséquences des obstacles se dressant entre Christine (car elle n'est plus une Plymouth, ni même une voiture) et Arnie.
L'entité Christine est vue comme néfaste, contre-nature, blasphématoire, par l'entourage d'Arnie, le jeune qui s'en prend plein la gueule par tout le monde.
Bien sûr, Leigh tombe dans ses bras du jeune homme introverti, mais ce n'est qu'une infidélité revancharde sur ses congénères tant attachés à des choses purement esthétiques.
Mais Arnie se reprends très vite, car il se sent réellement aimé par sa dulcinée mécanique. Elle le comprends intimement.
Christine prends aussi des initiatives. Elle se chargera de ceux qui l'enlaidissent et veulent l'enlever à son cher Arnie.
Lorsque Arnie verra l'amour de sa vie complètement ravagée par la haine ( et la jalousie) de Buddy Repperton et sa bande, il est touché jusqu'au tréfonds de son âme.
Mais pour la première fois, il sait que Christine ne l'abandonnera jamais. Leur amour étant à la vie à la mort, il n'aura qu'à lui demander avec assurance: "Show Me!".
Et Christine -gonflée par l'Amour de son amant éternel- n'aura même pas à se forcer pour se rétablir d'elle-même. Sa force intérieure -au propre comme au figuré- la ramènera à l'état initial qu'elle arborait à sa naissance, quelque part sur une chaine de Détroit.


Mais comme dans toute histoire d'amour, il y a toujours une fin. Christine laissera la haine de la rivalité la consumer et dans son effort pour détruire ceux qui pourraient encore détourner son Arnie de son emprise, Dennis et Leigh- coupable en plus de trahison envers Arnie- Christine en oubliera son corps strictement mécanique et peu sécurisé (pas de ceintures de sécurité, à cette époque), provoquant donc involontairement la mort de son amant.
Une fois Arnie éjecté au travers du pare-brise, les "yeux" de Christine se ferment (symbolisés par l'extinction des phares).
Arnie la touche affectueusement puis est enfin libéré des chaines de l'amour.
La colère (et la peine) de Christine la ramènera du Néant et elle se battra jusqu'au bout, tandis que Dennis et Leigh (soucieux avant tout de pouvoir poursuivre leur idylle), humilieront Christine en la violant avec le bulldozer.


Christine se débat de toute ses forces.
Puis elle gémit une dernière fois, avant de rendre l'âme.
Un dernier soubresaut nous apprendra que Christine -même par delà la mort- ne pardonnera jamais là ce nouveau couple adultère, le mal irréparable qu'il leur a fait .
Christine et Arnie était fait pour être ensemble.
Un couple parfait.
Les gens jalousent l'amour parfait.
Voilà pourquoi ils paieront de leurs vies, cet amour transgenre qui dépassait les frontières de l'acceptable, de la tolérance.


Christine est un hymne à l'amour.


Christine est une romance.


Mécanique, bien sûr...


Livre:8/10
Film:10/10

Franck_Plissken
10
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le 11 mars 2016

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The Lizard King

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