J’ai dû m’y reprendre à plusieurs reprises pour venir à bout de ce film. Je l’ai regardé en quatre fois, et je comprends ceux qui n’ont pas été séduits par ce long métrage, qui semble durer plus longtemps qu’en réalité. Et pour cause, Powell et Pressburger refusent toute dramaturgie excessive : pas de suspense, pas de surprise, pas d’action véritable. Tout est subtil, et l’ellipse est souvent de mise. En réalité, les deux cinéastes se concentrent sur la vie de notre héros et plus encore sur ses sentiments. L’éponyme Colonel Blimp est à la base une caricature, une sorte de vieille baderne à moustaches de l’armée britannique. Mais par leur talent, Powell et Pressburger en font un hymne au sens de l’honneur et au flegme britanniques, loin du prosélytisme qu’on serait en droit d’attendre de ce film originellement réalisé à des fins de propagande. En effet, le major-général Wynne-Candy, ridiculisé au début de l’histoire, se révèle profondément touchant quand on en apprend davantage sur son histoire. Son histoire se mêle d’ailleurs à la grande Histoire du Royaume-Uni et des guerres qu’il a menées au XXème siècle, de la guerre des Boers, en passant par le Première puis la Seconde Guerre Mondiale. En parallèle, on assiste à l’amitié de Wynne-Candy pour un soldat allemand du nom de Kretschmar-Schuldorff, cet amitié se révélant indéfectible malgré les évènements fâcheux qui opposent leurs deux pays. Et pour finir, Deborah Kerr illumine de sa présence le long métrage, en jouant trois rôles séparés dans le temps, incarnant une femme mystérieuse, au charme envoûtant et au cœur d’une histoire d’amour ratée, qui rend définitivement ce film et ses personnages terriblement attachants. Beaucoup de finesse et de nostalgie dans ce long métrage qui à mon sens reste l’un des tous meilleurs réalisés outre-Manche. J’avoue ne pas avoir été vraiment sensible au charme suranné du « Narcisse Noir », mais pour le coup j’ai été emporté par cette histoire au souffle fragile et délicat. Un très beau film, au Technicolor flamboyant, à voir jusqu’au bout pour en saisir toute la subtilité et la profondeur.


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ArthurDebussy
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le 12 mai 2017

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Arthur Debussy

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