Voilà le genre de films à qui toutes les notes peuvent convenir, le genre de films qui continue à nous faire gamberger à la sortie de la salle obscure, le genre de films qu'on aime où on déteste, en gros le genre typique de films sujet à controverse : chef-d'oeuvre pour certains, foutage de gueule pour d'autres un peu à la manière d'un Tree of Life de Malick.
Une seule certitude : l'oeuvre de DeLillo adapté au cinéma par Cronenberg ne laisse pas indifférent, et comme dirait Zitrone : " qu'on parle de moi en bien où en mal, peu importe, l'important c'est qu'on parle de moi... "

Alors oui les dialogues sont très inégaux, le film s'égare de temps te temps dans des considérations pseudo-philosophique sur le monde capitaliste dans lequel s'épanouit notre Golden Boy, du moins financièrement.
L'environnement est lui à contrario bien plus intéressant et franchement cette limo' a quelque chose de mystique, on a vraiment l'impression d'être coupé d'un monde en proie à de multiples remous, un monde qui amorce un changement décisif d'un point de vue économique ce qui entraîne la chute prématurée de l'empire Packer et pourtant, tout semble calme dans ce décor presque science-fiction avec tous ces écrans qui donnent une ambiance très futuriste.
La majeure partie du film se passe donc dans ce paquebot roulant où différents protagonistes apparaissent d'on ne sait où en entamant une longue, longue discussion philosophique pas toujours passionnante avec Packer...
J'ai parfois eu l'impression que Cronenberg souhaitait trop en mettre et franchement j'admets avoir décroché à quelques reprises, cette volonté d'abstraction des discussions énervent plus qu'autre chose et cette même volonté de faire cogiter le spectateur à tout prix produit finalement l'effet inverse.

Pourtant la mise en scène est d'une ingéniosité assez extraordinaire et Cronenberg se rattrape avec ça, certains plans sont vraiment inventifs et cette caméra souvent très proche du visage intrigue énormément, ça accentue l'effet malsain de la chose.
En fait la partie dialogue m'a vraiment dérangé que dans la dernière partie du film, en particulier la discussion finale, ça devient inintéressant et je comprends pourquoi certains qualifiaient le roman de DeLillo de complètement inadaptable à cause de sa proche ultra riche qui en devient étouffante par moment. Heureusement que la réalisation est brillante, je n'ose pas imaginer le résultat sans ce paramètre...
Exemple avec l'un des derniers plans où l'on suit la discussion interminable entre Pattinson et l'un de ses nombreux ennemis, la séparation du mur est plutôt bien trouvée comme pour illustrer le monde qui les sépare, la représentation des deux extrêmes de l'échelle sociale : d'un côté l'incarnation de la réussite et de l'autre un inadapté social complètement démuni et découragé face à un monde où il ne se sent pas à sa place.

Je mets quand même sept pour la prise de risque du réalisateur, sa mise en scène fascinante et l'originalité du film en général mais surtout à cause d'une intuition qui me fait penser que cette oeuvre assez dérangeante prendra tout son sens dans quelques années et donc par conséquent plaira davantage, 2001 de Kubrick et Citizen Kane ont été accueillies de façon désastreuse par le public et on connait la suite. Bien sur je ne compare pas Cosmopolis à ces deux chefs d'oeuvres mais tout de même, il y a vraiment quelque chose d'intriguant...

Un mot sur Robert Pattinson qui interprète ce fameux Eric Packer, j'avais un a priori très négatif sur lui à cause de son rôle malheureusement connu de tous et sa réputation d'acteur pour midinettes qui lui collait à la peau et pourtant dans ce film on a affaire à un acteur transformé, ce personnage lui convient à merveille et il démontre une aisance certaine. Cronenberg avait stupéfié pas mal de monde avec ce choix, aujourd'hui l'unanimité autour de la performance de son acteur est quasiment acquise.
Le reste du casting est sympathique également, le garde du corps impeccable lui aussi, Binoche tient son rôle mais le plus surprenant et plaisant reste Amalric, un acteur que j'aime beaucoup et qui démontre encore une fois tout son talent.

Et puis, balancer une tarte à la figure de Pattinson... Franchement qui n'en a pas rêvé ?
Strangeek
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le 28 mai 2012

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Strangeek

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