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Guy Roux est passé à côté d'une carrière...

Film culte des années 70 qui traînait gentiment sur ma commode depuis quelque temps, j’ai profité de sa mise à disposition gratuite sur Arte pour enfin le regarder. Sur le papier, il avait pourtant quelques atouts : une vedette reconnue, un réalisateur et un scénariste (futur réalisateur) promis au succès, ainsi que des « gueules » pour incarner les seconds rôles. Et, à titre personnel, un sujet - le football - qui me passionne.


Au final, j’ai passé un moment plutôt agréable, sans pour autant en garder un souvenir impérissable. Surtout, je n’ai pas pu m’empêcher de ressentir un certain côté désuet, notamment dans l’humour.

Sur ce point, je pense que la satire qu’Annaud souhaitait insuffler n’est pas vraiment compatible avec la bouffonnerie propre à Veber. Je dis « bouffonnerie », mais Veber reste bien sûr un formidable dialoguiste : on reconnaît d’ailleurs sa patte ici et là dans le film.

Ceci étant, Veber, ce sont aussi des films légers, des comédies de situation et des gags visuels baignés dans une ambiance parfois franchement farcesque. Et ce qui fonctionne dans des films comme La Chèvre, Le Dîner de cons ou Tais-toi ! ne prend peut-être pas dans un film qui prétend être réellement acerbe.


Ou alors, pas dans un film dont le point de départ est aussi grave. Le choix de dénoncer, à travers le viol d’une citoyenne, l’hypocrisie et la malhonnêteté d’une partie de la population (président, policiers, commerçants) est un parti pris intéressant… à condition de mettre de côté l’humour gras et léger qui accompagne certaines scènes, notamment la quasi-totalité des interactions entre Dewaere et la victime, souvent maladroites voire très peu à propos. D’ailleurs, que tout cela débouche sur une amourette paraît à la fois absurde et inutile.


Indépendamment de cela, si plusieurs blagues font mouche, l’exagération de certaines les font un peu tomber à plat. Je pense, par exemple, à l’exaltation de la population à l'hôpital, à la mi-temps ou après la victoire lorsqu'ils suivent Dewaere jusqu’à sa prison, ou encore aux policiers qui utilisent leur radio pour parler du match et concluent leurs messages par « Allez Trincamp ! ».

Oui, l’idée est de se moquer de cette ville où le foot est réellement l’opium du peuple, mais un peu plus de subtilité n’aurait pas fait de mal.


Pour moi, ce décalage entre l’humour forcé et la critique sociale constitue le principal point faible du film. À l’inverse, le cynisme de certains personnages, notamment celui du président, est bien plus réussi.


Côté interprétation, Jean Bouise est justement excellent, condescendant et méprisant juste ce qu’il faut. Certains seconds rôles - l’entraîneur, Robert Dalban, les policiers - sonnent justes. À l’inverse, Dewaere, avec son exubérance, apporte autant de vie au film qu’il ne crée le dit décalage avec le ton général. C’est un bon acteur, incontestablement, mais son personnage détonne trop avec les situations qu’on lui fait jouer. On sent aussi un petit côté « carte blanche, fais ce qu'il te plaît » qui finit par desservir le film.


Concernant la mise en scène, rien de remarquable à signaler, mais c’est efficace. Je trouve même que les scènes de match sont plutôt réussies, alors que ce genre de séquences est souvent casse-gueule : trop artificiel ou tout simplement chiant. Ici, Annaud s’en sort bien, il faut le souligner ! Peut-être grâce à la patte de Guy Roux, allez savoir.


Quant à l’histoire, elle reste agréable et la satire est bien trouvée. Mais sur un film d’1 h 25, marteler pendant plus d’une heure la corruption des notables prêts à étouffer un viol pour une victoire et la paix sociale finit par devenir un peu répétitif. Allez, il y a aussi le côté gaga de la ville mais ça reste la même idée qui est pointée du doigt finalement.


Bref, un moment pas désagréable, mais sans doute pas un film qui me marquera durablement.


Jsiat
6
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le 10 nov. 2025

Critique lue 16 fois

Jsiat

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