"M. Night Shamalan or whatever his name is" a forcément vu ce film de Carlos Saura habituellement interprété comme une métaphore de l'Espagne se libérant du franquisme. Je laisse aux spécialistes de l'histoire espagnole ce décryptage ésotérique qui me semble un peu spécieux. Il s'agit en fait surtout d'une plongée sans protection dans l'enfance et la féminité. Les fautes de jeu des enfants, les regards caméra de la petite Maïté, la rigidité d'Ana, le personnage central présent dans quasiment tous les plans, le doublage de Geraldine Chaplin, tous ces légers décalages plus ou moins volontaires, participent de la description d'une incommunicabilité du monde de l'enfance et particulièrement de celui des filles. Le mystère s'épaissit bien entendu au fur et à mesure que l'on avance dans le film, et les premières clés données par le réalisateur s'avèrent être des fausses pistes, révélatrices de la complexité du tissu narratif et du sujet. La mise en scène proche du reportage, peut faire penser par moment à un John Cassavetes dans sa volonté d'esquisse rapide et sans façon, proche de la vérité des acteurs. Les silences sont fréquents et la musique ne libère qu'à quelques occasions du poids des incompréhensions qu'exerce l'obsession de l'absence maternelle. Il faut toute la légèreté et la pureté de l'enfance pour rendre possible la vision de ce film indispensable et irréductible. Et finalement, une conclusion s'impose : les enfants voient des gens morts.

ariel34134
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le 6 mai 2021

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