Les films américains sur la Seconde Guerre Mondiale, il en existe des dizaines et des dizaines. Mais des films américains sur la Seconde Guerre Mondiale qui se placent du côté de l'armée allemande, ça, c'est beaucoup plus rare, et cela mérite d'être noté. C'est le cas pour Croix de Fer.
Derrière l'apparent exercice de style se cache en réalité une idée qui permet de donner de la guerre une image radicalement différente de ce que Hollywood propose habituellement. Quand il s'agit d'évoquer l'armée américaine, les studios s'en tiennent toujours à un certain devoir de réserve, afin de ne pas trop froisser un état-major qui leur sert aussi souvent de sponsor, mettant à disposition moyens matériels et financiers. Tandis que là, le réalisateur met en scène des affrontements entre des Allemands et des Russes, ce qui laisse infiniment plus de liberté ; les premiers étant les anciens « méchants » et les seconds l'étant devenu pendant la Guerre Froide. Aucune raison de se brider, car personne ne viendra pleurer sur leur sort pas toujours enviable. Cela ne tourne pas pour autant en « regarder comme ils sont méchants, à la différence de nos gentils soldats » ; et c'est en cela que Croix de Fer est une réussite. D'une part, les héros – car ce sont effectivement des héros – sont des personnages humains et attachants, blagueurs et bagarreurs mais rompus au combat. D'autre part, le premier rôle a été confié à James Coburn – qui porte bien son nom, car il a effectivement une grosse paire de coburnes – un habitué du film de guerre, notamment présent dans La Grande Evasion ; son regard et son visage buriné font merveille, et le classent sans problème dans la même catégorie qu'un Bronson, un Eastwood, un Marvin, et bien entendu un Wayne, soit des héros typiquement américains.
Ici, les hommes sont des hommes, et non des allégories ou les produits d'un système. Il y a des salopards, des braves gars, et des types qui n'ont tout simplement rien demandé. Les conditions de vie sont déplorables, l'horreur et la peur omniprésentes, et le réalisateur Sam Peckinpah (Pat Garrett & Billy the Kid, La Horde Sauvage) en profite pour montrer les pires ignominies de la guerre – en cela, ce film devient très impressionnant – dénoncer les abus d'autorité, et même aborder un thème normalement absent de ce genre de productions : l'homosexualité chez les soldats (qui n'existe évidemment pas dans l'armée américaine).
Tout cela fait de Croix de Fer une des productions les plus violentes et tragiques que j'ai pu voir sur le sujet. Et une réussite.

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le 4 mars 2012

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Ninesisters

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