Anti - héros de Comics adapté au cinéma ?

Il est clair que la campagne d'advertisement autour de ce film est une franche réussite. Il est assez intuitif d'affirmer qu'une bonne partie des spectateurs ont (ou sont) attirés par cette oeuvre du fait de la promesse qu'il porte en lui : apporter une nouveau point de vue sur les adaptations de héros de comics au cinéma, et plus pécisément "trivialiser" ce type personnage (peut-être dans le but de permettre aux spectateurs de s'identifier à lui, ce qui peut paraître paradoxal pour un "héros" de comics puisque ceux-ci sont par définition inaccessibles aux personnes lambdas du fait de leurs pouvoirs surhumains).Dans le même ordre d'idée, The Dark Knight est certainement le premier film adapté de comics américains qui essaie de rompre avec l'aspect "fantastiquo-infantile" de ce type de films (dont les premiers Spider-man peuvent être un parfait exemple), mais en adoptant quant à lui un ton sérieux, se revendiquant plus comme un film policier qu'autre chose. La question centrale que pose donc le film Deadpool est : la promesse est-elle tenue ? Autrement dit,en quoi Deadpool s'éloigne (plus ou moins) du héros de comics adapté au cinéma traditionnel (HCACT) ?
Il est évident que les éléments de blockbusters type Spider-man sont assez présents dans Deadpool. On s'amuser à les énumérer :
- L'effusion d'effets spéciaux s'apparentant à de la "préscience-fiction" : l'énorme vaisseau appraissant je ne sais plus où et surtout la 2e partie du film avec le lieu du combat final qui est une sorte de paroxysme spatial qui fait écho au paroxysme de l'intrigue où Wade retrouve Francis.
- La présence du "méchant", qui se caractérise bien évidemment par sa méchanceté pure et gratuite (ce qui est critiquable, ça aurait été peut-être mieux d'apporter des éléments sur l'histoire de "Ajax", pour comprendre justement comment on peut arriver à un tel sadisme)
- Le sentiment amoureux est présent là aussi; ça aurait d'ailleurs presque pu être un spin off sur La Chose, ce personnage des 4 fantastiques qui essaie de reconquérir sa bien aimée après avoir été défiguré par ses pouvoirs (à la différence près que la défiguration est accidentelle pour La Chose)
- L'univers X-men assez prépondérant, au vu de la manière adoptée par Wilson pour acquérir ses pouvoirs (expérimentations dans un labo), au vu aussi de certains personnages secondaires (la montagne de fer, la fille "nucléaire") qui sont des mutants travaillat pour le professeur Xavier (non cité dans le film mais on le devine assez facilement à travers ce qu'ils appellent leur organisation), et enfin au vu de l'apparition du QG de Xavier; cet univers X-men peut paraître assez décevant, car atténuant l'aspect "rafraîchissant" de Deadpool.

Néanmoins, d'autres aspects du film sont intéressants à noter, car l'éloignant assez significativement du HCACT. On peut là aussi s'amuser à les énumérer :
- Pas de présence infantile (morale ou physique ) (cf les premiers Spider-man par exemple, les 4 fantastiques..., où à chaque exploit du héros on pouvait observer toute une rangée de gamins subjugués) ... ce qui est plutôt agréable
- L'histoire d'amour est centrale, c'est le noeud de l'intrigue contrairement aux autres adaptations puisque c'est par amour que Wade Wilson va chercher ses potentiels nouveaux pouvoirs (ce n'est pas un don accidentel); par ailleurs, la manière d'aborder le sentiment amoureux est différente de l'amour classique des Comics ( l'analepse sur la rencontre amoureuse et le développement de la complicité du couple fait presque sortir le film - pendant quelques dizaines de minutes - du cadre du comics, en donnant l'impression qu'on est plus dans une "romance prosaïque"), sans oublier les scènes de sexe bien sûr.
- Le caractère anti-héroïque de Wade Wilson, puisque en effet celui-ci n'est qu'un mercenaire reconverti en homme avide de vengeance, et qui prend qui plus est du plaisir à tuer de manière assez sanglante ses ennemis ("ses" et non pas "des", car il ne combat pas les ennemis de la société mais ses propres ennemis, contrairement aux Batman et cie)
- "Le 4e mur est détruit", dixit Deadpool : cette mise en abîme reflète bien le caractère novateur de ce film ; en l'occurence, le personnage principal s'adresse parfois directement au public, contôle la caméra, contrôle le cadre spatio-temporel en déclenchant des retours en arrière par exemple ( technique assez popularisée qu'on retrouve dans Ciudad de Deus et Slumdog Millionaire par exemple) ... on pourrait presque dire qu'il contrôle l'intrigue et le film lui-même.
- L'aspect comique (comique de situation, de parole et de geste surtout) ainsi que la vulgarité (pas très surprenant, c'était déjà annoncé), ce qui est assez agréable là-aussi.

Conclusion : Deadpool est une grosse bouffée d'air frais dans l'univers des comics adaptés en oeuvres cinématographiques, dont il devient d'ores et déjà une des figures incontournables. C'est une histoire d'amour surtout, qui ne se prend pas au sérieux, et devant laquelle on passe du bon temps. Cependant, il y avait encore des "déchets comicsiens" (surtout l'abus d'effets spéciaux et de pouvoirs spectaculaires (notamment les 2 X-men) dont on pouvait se passer, ce qui aurait hissé ce film à un rang plus haut.