Dans tout bon film de guerre, il y a des obligations indispensables à la bonne marche du récit : des soldats avec du bon sens, dépités mais qui obéissent malgré tout aux ordres, des gens qui deviennent fous, des charniers, des scènes d'action caméra à l'épaule, bref, de quoi nous rappeler que la guerre, c'est sale, que les gens qui la font ne la comprennent pas mieux mais qu'ils s'exposent aux limites de la compréhension de l'humain. Ça, Démineurs l'a et le fait tourner convenablement, en petite forme, certes, mais avec l'intention de bien dire tout ce qui doit l'être quand l'on traite avec un sujet comme la guerre. Toutefois, mon avis se focalise d'avantage sur ce fait précis : pour moi, Démineurs n'est pas réellement un film sur la guerre.

Admettons, il a été vendu comme tel et c'est bien là son plus grand tort, d'autant que le bougre essaye perpétuellement de le faire croire, avec quelques scènes de guérilla, quelques scènes de désert et une longue scène de snip', mais d'une grande grande longueur. Toutefois, je persiste à dire que Démineurs ne devrait pas être regardé comme un film ayant pour sujet la guerre et, comme le soulevait un collègue senscritiquien, la phrase qui ouvre le film, "La guerre est une drogue", m'est apparu comme l'aveu de cette volonté. De quoi parle-t-on, alors ? On nous vend pourtant bien le quotidien - romancé, j'imagine - d'une unité de démineurs dont l'officier, brillant, est mort à cause d'une erreur humaine, une bête hésitation. Aussitôt, l'homme est remplacé par le Sergent James, un risque-tout un peu limité, peu porté sur le travail en équipe et kamikaze. Incarné par Jeremy Renner, c'est le pilier du film et en réalité, je pense, le grand intérêt de ce récit qui dit - et peut-être croit sincèrement - parler de guerre.
On y dépeint plus précisément le portrait de cet homme, un portrait qui présente des aspérités, des irrégularités, sans jamais tenter d'entrer en profondeur dans la tête du personnage - afin, sans doute, d'éviter tout jugement sur son comportement. Le sergent William James est un con. Il est sans doute doué, mais il travaille en solo, au mépris des protocoles. Toutefois, il ne s'en vante pas et tente même de valoriser les deux autres membres de son équipe. En réalité, William James est un drogué, qui ment à son entourage comme à lui-même, se complaît dans cette situation bancale et précaire de s'affranchir de tout, sauf de la bombe, et par-delà, de la mort. Mais c'est dit avec ses mots, qui se cherchent, qui ne se reconnaissent pas et doutent de tout, si ce n'est de ne pas être un bon père ou un bon mari et de préférer, à la quiétude du quotidien familiale, le sable et le vent de la guerre.

Personnellement, et contrairement à d'estimés collègues, j'avoue avoir été séduit par l'interprétation et le parcours de Jeremy Renner, plus que par les scènes de ralenti durant les explosions ou la soi-disante reconstitution d'un conflit. Mais peut-être est-ce là le tort du film, comme je le disais, de vouloir dépeindre une addiction en promettant à son spectateur un récit guerrier. Pour ma part, ayant été prévenu de ce sens de lecture, je n'ai pas eu trop de mal à entrer dans le film.
0eil
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le 21 juin 2011

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