Le blues, ce n'est pas ce que manque dans ce film : les personnages, l'ambiance, les décors, les propos, l'intrigue et bien sûr la musique; c'est une incursion dans une mélancolie un peu drôle, un peu triste, un peu surprenante qui se termine toujours mal, comme la vie - mais qui célèbre cet intervalle de vie où nos misérables viandes peuvent jouir du moment en essayant d'atteindre, parfois, cet instant de grâce qui fait que cela valait le coup.
C'est un peu comme ça que je me représente l'état d'esprit du protagoniste avec lequel j'ai du mal à m'identifier et qui pourtant est sympathique, mystérieux, intéressant, du début à la fin.
C'est un film maîtrisé de bout en bout, qui présente de beaux mais discrets moments de mise à scène - j'ai été étonné d'apprendre que c'est un premier film. Un film en équilibre entre n'avoir pas de sujet précis, se partage entre plusieurs arcs narratifs sans pour autant se disperser, offre une tension continue sans spectaculaire, ni intervalle, ni pause, comme une pente douce mais inéluctable.
Le revoyant après l'avoir vu à sa sortie, je réalise que c'est avant tout un film de potes, cinq comme les doigts de la main qui font le "boat drink", cinq amis qui ont "fait des choses" et en sont pour toujours intriqués, malgré leurs différences, et qui vont partager l'issue tragique de leurs choix discutables.
Ce n'est pas un film de gangster comme je l'avais initialement perçu, mais un film qui utilise ce genre comme une toile de fond pour dépeindre des destins tragicomiques, comme dans un livre de Georges Pelecanos.
Et c'est une belle galerie de personnages qui sont présentés, Jimmy The Saint, Critical Bill, Pieces, tous hauts en couleurs, pertinents, assez archétypaux pour être facilement compris mais assez subtils pour être surprenants, prisonniers plus ou moins volontaires de leurs tropismes, comme nous tous. Et qui sont interprétés par une belle brochette d'acteurs, le casting est au niveau.
Dans sa construction, sa narration pleines de détails mais qui sait ne pas s'attarder, et sa réalisation, qui fait la part belle aux dialogues et aux intentions pas toujours évidentes de ses personnages, on pourra trouver un écho discret aux systèmes des films de Tarantino, les fusillades en moins. Une chronique bluesymentale, peut-être.

simonvart
8
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le 15 avr. 2021

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