Désiré, pas tant que ça
Fanny Ardant étant présente dans ce film, je ne pouvais ne pas le regarder. Bon maintenant c'est fait, et après ? Ce n'est pas son plus grand rôle mais elle y joue bien, quant à Belmondo il signe...
le 10 janv. 2024
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Ce film est connu aujourd'hui uniquement pour la harangue de Bebel au journal télévisé lors de sa sortie en salles. L'acteur exprimait passionnément sa déception de ne pas être distribué comme un blockbuster, mais son produit était tres difficilement vendable, même pour un téléfilm du samedi soir. Détails ci-dessous.
Il s'agit d'abord de théâtre filmé avec comme seule différence une prise de son rapprochée permettant un jeu plus naturel (mais le dialogue reste théâtral). La pièce de théâtre choisie est une vieillerie sous-écrite du Sasha Guitry des annees 30 qui aurait fait un sketch de 5 minutes peut-être plaisant, mais étalée sur 90 minutes, mérite de rester à sa place dans le fond de tiroir poussiéreux du domaine public. La proposition de départ est légèrement cocasse, mais le dialogue est plat, les personnages inintéressants, et la trame ne va nulle part (comme toujours chez Guitry d'ailleurs). Cet erzat de pièce de théâtre suffit peut-être au public populaire de 1927, mais en 1995 c'est terriblement anodin et désuet.
Il y a aussi un autre éléphant sous le tapis, c'est que, depuis son second accessit (la récompense la plus nulle) au conservatoire, Bebel n'a jamais été très doué pour le théâtre. Son Kean, ses Fedaux, son Frederique, étaient tous très primaires ; quant à son Cyrano, il fut probablement l'un des plus faibles en date, à mon opinion.
Son talent d'acteur reposait entièrement sur son charisme suave et décontracté que seuls les moyens du cinéma pouvaient reelement mettre en valeur. Au théâtre, c'est son aura, cette énergie si particulière, qui lui gagnait les foules présentes, certainement pas son jeu forcé et proclamatoire que sa voix nasillarde et peu porteuse exacerbait et que le theatre filmé rend encore plus évident.
Il est ici heureusement beaucoup plus à l'aise, puisqu'il y a les micros pour le son en rapproché, mais c'est Béatrice Dalle qui lui vole la vedette : elle parvient à rendre son dialogue complètement naturel, ce qui montre la maitrise très sous-estimée de cette actrice. De toute façon, ils sont tous les deux loin de suffire à maintenir l'intérêt, vu que la réalisation sans cachet ne pourrait être plus mollassonne et que le reste du casting est d'une fadesse à la limite du minable : Claude Rich et Fanny Ardant sont nuls. Jean Yanne n'est pas drôle. Quelle médiocrité. C'est là que les Bernard Blier, les Louis de Funès, les Francis Blanche, les Jean Gabin et autres magiciens d'antan se font cruellement regretter.
Mais là où le bât blesse le plus, c'est bien le scénario qui est une véritable insulte a l'inteligence du spectateur.Nous sommes 6 ans apres le Cyrano avec Depardieu, adapté par Jean Claude Carriere et Jean Paul Rappeneau. Le mode d'emploi etait donc la. Si on m'imposait d'écrire un remake de Désiré pour le cinéma (surtout pour une sortie en salles et pour le grand public) je me casserais un peu la tête pour essayer de développer cette idée de départ afin que la trame débouche sur des situations plus intéressantes, je retravaillerais tout le dialogue (qui est ici d'un ennui pas possible). Je supprimerai tous les personnages inutiles (comme les invités du dîner et la cuisinière). Il me faudrait emmêler les jeux amoureux de façon à ce que la tension sexuelle voyage constamment entre les différents personnages. Je mettrai le ministre en directe compétition de séduction avec Desiré et trouverai le moyen de tirer parti du sex-appeal de la bonne. Bien sûr, j'essayerai d'inventer un deuxième et un troisième acte, car cette pièce, comme toute pièce de Guitry, ne VA NULLE PART: une fois la proposition de départ installée. Il ne se passe simplement rien.
Mais comme les producteurs ont opté pour le non-effort (du simple théâtre filmé), je ne vois pas comment ils pouvaient, même avec Bebel dans le rôle principal, espérer en faire un succès populaire à moins de forcer le ministère de la Culture à en imposer le visionnage dans les maisons de retraites ! Par contre, ils pouvaient rendre la pièce d'origine encore plus mauvaise en y rajoutant une musique encore plus insipide comme fond sonore, ecceuil dans lequel ils sont aussi tombés.
Pour conclure, il y a en général un consensus très favorable à Sasha Guitry qui nous est toujours présenté comme un grand dialoguiste, une sorte d'Audiard avant l'heure, alors que sa prose est terriblement banale et sans invention, et que ses histoires ne vont jamais plus loin que le sketch de départ. Rien dans son travail ne mérite une quelconque relecture au grand public d'aujord'hui à mon avis. Quant à Bebel, il avait une passion pour le théâtre où il n'était pas très doué, et s'il prend énormément de plaisir à être sur scène, le spectateur exigeant y trouve moins son compte. Passez votre chemin et ce n'est pas parcequ'on vous repette sans cesse que des vessies sont des lanternes qu'elles le deviennent.
Créée
le 4 avr. 2025
Modifiée
le 5 avr. 2025
Critique lue 23 fois
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