Semi-fiction admirable : prison telle un monastère militaire ; soumission des détenus entière et complète à un règlement strict et rigoureux à un point d'abstraction que ne sait atteindre que la civilisation japonaise. Existence au cordeau dans un lieu au cordeau, utopie appliquée. La rigueur - qui reste en deça de la cruauté -, infantilise les détenus et en même temps pacifie les relations, ou du moins les nivelle. Gardien ou détenu, chacun tient son rang dans les rouages précis de l'institution où le moindre dérapage est redressé à la seconde. Un occidental peut s'étonner de cet ordre parfait alors que la punition ultime semble être l'isolement dans une cellule monacale, nette et claire, aux conditions pas moins confortables que la cellule collective. L'on en vient à se dire que le respect d'une règle aussi rigoureuse se fonde en quelque sorte sur son acceptation volontaire pour le confort de la routine qu'elle apporte, routine dispensant de toute lutte ou préoccupation. Une sorte de meilleur-des-mondes oubliant toute rébellion, où la routine disciplinaire a remplacé le soma.
Songeur à l'idée que de tels lieux existent et fonctionnent - sans être dupe qu'ils sont le reflet de la société nippone où règne la hiérarchie, l'auto-surveillance et la délation.
Songeur à l'idée que cette prison est une prison de basse sécurité.
Esthétique indéniable de la façon de filmer cette cérémonie perpétuelle. Puisqu'il est question de quotidien et de temps, le grand corridor central cite Ozu par sa symétrie frontale en plan-tatami, Ozu que l'on retrouve dans d'autres plans – lieux vides, linge qui flotte au vent.
Seul bémol, le prologue censé expliquer la raison de l'incarcération du personnage central, qui, sans rien apporter, aurait même un effet répulsif par son amateurisme brouillon.
Reste à lire le manga pour se faire une idée de la source du film.