Intriguant de voir qu’en 1h30 et en filmant douze hommes dans un salle, Sidney Lumet a tissé l’un des portraits les plus flagrants et les plus réalistes de notre monde. Un huit-clôt qui captive et qui en dit long sur la moralité.
C’est l’histoire de douze jurés, enfermés dans une salle pour débattre sur un sujet, la condamnation à mort d’un jeune homme accusé d’avoir assassiné son père. L’accusé est difficilement défensable, et le jury ne semble pas porté une grande importance sur la vie de ce jeune garçon. Mais un homme, le juré n°7 semble le seul à refuser de condamner ce jeune homme sans en discuter un peu. Il n’est pas sûr de son innocence, mais va droit au but, on ne décide pas la vie ou la mort de quelqu’un en cinq minutes. Face à l’énervement de ses camarades, le n°7 va devoir argumenter, convaincre ses collègues que le jeune homme n’est pas forcément coupable.
Une heure et demi de dialogue, un heure et demi sans qu’il ne se passe autre chose que des hommes qui réfléchissent, et pourtant, on ne s’ennuie pas et le doute est là jusqu’aux derniers instants. Car il suffirait qu’un seul homme, refuse catégoriquement que l’accusé soit innocent, pour qu’il soit perdu.
Face à la froideur de notre société, le film nous fait prendre conscience de l’absurdité de l’humain. Car chaque personnage semble représenté une catégorie du citoyen américain. On ne sait rien d’eux, à part leur numéro, et leur travail. Un architecte honnête, un ouvrier partagé, un publicitaire, où un simple homme qui n’a qu’une envie, en finir avec ce procès pour filer à son match de base-ball. C’est d’ailleurs ce personnage qui semble le plus inhumain tant son seul intérêt est de partir, et ceux par tous les moyens, faisant en sorte que ce procès dure le moins longtemps. Bref, une brillante représentation de l’homme nombriliste, aux premiers abords sympathique, mais qui se révèle vite irritant. Et pourtant, ce n’est qu’un homme parmi ces douze jurés. On pourrait presque renommer ce film en « les onze salopards » tant une seule personne brille par son honnêteté : Henry Fonda, le n°7. C’est presque à se reposer la question de la nature humaine, en fin de compte, le seul qui n’est pas un humain, qui est dessus, c’est le solitaire n°7.
En voilà donc un film qui aborde tant de sujets de notre société qui plus est, en une heure trente dans une salle. Un film si riche, alors que ce n’était que le premier film de Lumet. Un film si captivant, alors que c’est un huit-clôt. Un film si porteur de sens alors qu’il ne dure qu’une heure trente. Ce serait pas un défi quasi-impossible remporté haut la main, ça ? Parce réussir un film avec autant de contrainte, ça révèle du génie.

James-Betaman

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