Le synopsis de Drunk peut avoir un air de déjà-vu : quatre professeurs quarantenaires qui expérimente sur eux-mêmes une théorie, comme quoi, il nous manque 0.5g d'alcool dans le sang. Une expérimentation qui, forcément, apportera du bon, mais aussi des bas.


Ce déjà-vu, il l'est dans l'aspect film-concept : j'ai pensé à Yes Man, qui commence par une situation initiale discutable (ne profite pas assez de la vie) pour amener son personnage à évoluer, en bien, avant d'avoir à poser des limites. Le tout avec une happy end et la morale explicitement dite.


Ce classicisme, si on le retrouve chez Drunk, ne l'empêche pas d'être extrêmement efficace et touchant. Particulièrement en étant humain.


L'alcool : Un moyen, pas une fin


Car il serait facile de simplement utiliser l'alcool comme moyen comique. Le film ne décide pas cela. Certes, c'est drôle de voir un professeur parler d'Histoire en ayant bu un peu; mais la réussite du film, c'est son contexte : suivre des quarantenaires, c'est suivre leurs crises (pas marié, seul, couple dans une monotonie, devenir barbant). L'alcool aidant, ils vont se lâcher, exprimer plus clairement leurs envies.


Et ces thématiques, si elles touchent peut-être plus des adultes, n'empêchent pas les jeunes de s'y retrouver. Déjà par certaines mentions d'éléments strictement scolaires (la peur de l'échec), mais aussi car la solitude, la monotonie de la vie, etc. ne sont pas des choses exclusives aux adultes. C'est encore plus agréable quand le film termine par une note heureuse, malgré une situation qui ne l'est pas. Dans mon cas, ça touche particulièrement un vécu récent.


Un traitement humain, donc; et ce traitement humain, il est présent sur énormément d'aspects de montage, de rythme, d'ambiance.


Ressentir, ne pas dire


Généralement à niveau d'homme, voire près des visages, le film cherche à nous immiscer dans leurs intimités, pour mieux les comprendre. Quand Martin (le personnage de Mads Mikkelsen) a envie de boire avec ses amis, ses expressions du visage nous indiquent clairement cette envie. C'est une utilisation simple, mais efficace, pour nous faire comprendre les sentiments qui parcoure les personnages sans avoir besoin d'expliciter par l'oral.


Et cela est aider par l'ambiance : le film possède, finalement, peu de musique. Majoritairement sans, parfois pour se concentrer sur les personnages, mais souvent pour mettre en avant l'aspect monotone des choses : un silence, où l'ont entend un professeur déballer un cours chiant, ou un personnage qui mange seul; ce qui renforce ces moments triste (voire pathétique). Et quand la musique est présente, c'est souvent dans les moments d'euphorie d'alcool. Une sensation qui est encore plus présente dans une salle de cinéma : j'ai eu l'impression que le son s'amplifiait par moment, selon le taux d'alcool dans le sang.


Plutôt lent, le film accélère dans les moments d'alcools. Là aussi, c'est pour être en phase avec les personnages. Il me parait important aussi de noter les informations diégétiques qui sont données au spectateur : quand un personnage écrit, ou respire dans un alcooltest, le film passera sur fond noir pour nous indiquer qu'est-ce qui est écrit, ou le taux d'alcool dans le sang. J'ai trouvé là aussi que cela nous rapprochait des personnages : ils écrivent ce qu'on lit, ou alors ils sont au courant de leur taux d'alcool dans le sang.


Le classicisme narratif du film ne l'empêche donc pas de briller sur de nombreux points. Il ne m'a pas paru de l'indiquer, mais les performances d'acteurs joue énormément. Mention spéciale à Mads Mikkelsen en professeur d'Histoire (qui permet de parler de l'alcoolisme de certains dirigeants historique - on a même eu un montage, avec Nicolas Sarkozy !), une merveille.


Conclusion


Classique dans la forme, Drunk reste un petit bijou de cinéma, qu'on retiendra avant tout pour l'histoire humaine qu'il nous propose. Une histoire humaine que l'on ressent avec les personnages, dans leur meilleur (joie, humour) comme leur pire moment (colère, tristesse, solitude). Drunk, c'est une histoire d'alcool, mais surtout une histoire sur la vie, le fait de vivre. Et ça, ça me parait universel.

Marouane1804
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le 15 oct. 2020

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Marouane1804

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