Rétrospective #7 : Ebirah vs Godzilla (1966)

Un sympathique visionnage que fut ce Ebirah vs Godzilla.

La première apparition d'Ebirah est franchement réussie. Les miniatures fonctionnent bien, et le montage couplé à la mise en scène rend le tout plutôt convaincant malgré un plan ou deux sur la miniature du yacht qui durent un peu trop longtemps, vendant la mèche puisqu'on voit les petites figures rester immobiles ou encore quelques brefs instants où l'on voit le mur du bassin derrière la pince d'Ebirah.

Ce passage montre surtout que c'est de nuit que ces monstres peuvent prendre toute leur (dé)mesure. On le voit bien avec la scène suivante d'Ebirah, qui cette fois se déroule de jour et en montre hélas un poil trop après avoir si bien teasé la bête quelques minutes plus tôt.

D'ailleurs je suis un peu déçu de la tronche d'Ebirah, j'sais pas pourquoi mais je croyais avoir quelque chose d'autre en tête, plus bestial, et pas juste un homard XXL. Godzilla se tient toujours trop droit à mon goût.

Mais ça n'enlève pas grand chose au film non plus, qui est plutôt un film d'aventure avec une équipe de protagonistes réunis par la force des choses. Ils sont d'ailleurs plutôt attachants, ont des traits de personnalités, ne sont pas des robots qui vont d'un point A à un point B sans broncher. Par contre fait chier, les lilliputiennes sont de retour, déjà.

Heureusement elles n'apparaissent pas beaucoup donc j'ai pas eu de soucis. En vrai elles ne servent pas à grand chose si ce n'est de rappeler au spectateur que Mothra est dans le film, et donc qu'une fois encore il jouera le rôle de deus ex machina (mais j'imagine que c'est un peu sa marque de fabrique, c'est littéralement son rôle), ce qui me déplaît pas mal je dois l'admettre. Les chansons sont toujours aussi chiantes.

Les combats de monstres sont par contre toujours assez cons, c'est baigné dans une atmosphère qui pourrait pourtant permettre tellement mieux, mais ça reste sacrément con. Une fois de plus naturellement Godzilla se devait de.... shooter dans un rocher. Autres trucs cons : Godzilla qui s'endort comme ça, pour rien, Godzilla qui fout sa main près du piff en mode "j'ai le flair", tout le passage où les avions l'attaquent avec une petite musique de beach rock en fond fait un peu tâche, d'autant qu'il ne dure pas bien longtemps, etc.

Je note surtout que les scènes de nuit sont vraiment réussies dans cet opus en fait, et quand je repense à celles que j'avais pointé du doigt quelques épisodes plus tôt, je suis ravi de la courbe de progression sur ce point, il en faudrait davantage.

La mise en scène est plus efficace, avec par exemple des tempêtes qui sont vraiment satisfaisantes à voir se déchaîner de nuit. Y a d'autres fois où c'est plus loupé, comme le reveal de Godzilla, endormi et enseveli dans la caverne, qui a vraiment la tronche d'un jouet , ridiculisant un peu l'effet de découverte (on fermera les yeux sur comment il a fini là).

Visuellement j'ai trouvé le film plus léché que les précédents. Y a quelques effets de style genre des transitions via des plans sur le ciel qui s'assombrit ou s'éclaircit, les scènes de nuit sont pas mal du tout même si on sent encore le studio, deux trois mouvements rapides ou zooms de caméra qui renforcent le réalisme, du débullé par-ci par-là... le film a des atmosphères qui fonctionnent bien, et l'intrigue se déroulant totalement sur une île permet de nous dépayser dans des décors qui ne font pas trop fake ce qui est toujours sympa.

Les techniques pour mettre dans un même plan monstres et humains semblent davantage puiser dans les méthodes utilisées sur les films impliquant Ray Harryhausen qu'auparavant, et ça marche plutôt bien aussi. C'était déjà le cas par moment avant, mais là ça m'a paru beaucoup plus fréquent et mieux exécuté.

Coté déroulement, il prend son temps dans les moments où il faut le prendre comme la scène "d'infiltration" en plus de se permettre quelques moments de tension qui, à l'échelle modeste de ce film de niche, fonctionnent ma foi pas si mal que ça malgré la facilité avec laquelle l'équipe parvient à se déplacer. L'humour fonctionne mieux et est mieux dosé. Même les combats m'ont parus plus réussis même si toujours cheap et souvent cons.

Le dernier tiers s'essouffle un peu cependant, sur beaucoup de points (le saut de Godzilla dans l'eau omg, pis ce délire d'humains réussissant à s'adresser à des monstres me sort un peu trop rapidement du film).

Coté musique, par moment c'est très approprié mais lors d'affrontements de monstres ils nous sortirons parfois une ptite musique enjouée et faut admettre que ça ne passe pas trop. On sent là aussi l'influence des films d'espions.

La partie avec les humains est plutôt fun à suivre, les apparitions des monstres, malgré leurs designs toujours bas de gamme, sont à quelques exceptions près bien mis en scène, les apparitions d'Ebirah dans la nuit, plus spécifiquement quand on n'en voit que les pinces, sont parmi les plus réussies de la saga so far.

Ouaip vraiment je l'ai plutôt bien aimé cet opus. Probablement celui que j'ai le plus apprécié depuis Godzilla vs. Kong, et ce pas forcément car c'était drôle tant c'était naze : le film était sincèrement divertissant grâce à des qualités, tout en demeurant attachant par ses défauts. Y a des plans qui ne fonctionnent toujours pas, des effets visuels ou sonores loupés, des costumes moches, des bêtes au déplacement un peu trop humain, la sensation de poids pas encore là, mais quand même. J'ai pas senti la flemme, j'ai eu l'impression d'avoir vu un film davantage pensé, travaillé, et abouti.

On est désormais totalement séparés de l'approche allégorique et quasi cathartique du tout premier (ça ne se déroule même plus près d'une ou dans une ville), là c'est un pur film de divertissement qui s'essaye au genre aventure. Les précédents l'étaient déjà aussi, mais celui-ci encore plus que le précédent m'a semblé bien mieux réussir dans cette exercice.

C'est un sympathique film d'aventure qui s'avère avoir des monstres dans la formule.