GROSSE CAVALERIE ET GROSSES BLAGOUNETTES
Le problème avec bon nombre de blockbusters, c'est leur perpétuelle prise au sérieux, saupoudrée comme il se doit de sourires colgate et de scénarios ultra balisés. On finit par se lasser avant même les quinze premières minutes, tellement tout rentre dans le cadre: musique, scénario, twists, réalisation, effets spéciaux, etc, etc. Aucune prise de risque, aucune finesse, mais surtout aucun fun. On s'ennuie tellement c'est lissé dans tous les sens, et ça vous liquéfie le cerveau. Enfin, à quelques exceptions près, car certains réalisateurs savent encore surprendre malgré l'armada de producteurs exécutifs en embuscade; parés à commenter la moindre réplique pour voir si elle colle bien à l'humour de la ménagère de moins de trente-cinq ans.
Et heureusement pour tout le monde, heureusement pour moi dirais-je, car même si au fil du temps j'apprécie de plus en plus les petites productions indés pour (au moins) leur plus forte propension à prendre des risques, j'aime quand même me détendre les mirettes avec du plus conventionnel, du plus facilement regardable. Disons-le tout net: Ce qui passe dans la Hollymoulinette est trop souvent tiré vers le bas, mais il y a quand même des surprises de temps en temps, des films qui passent au travers des mailles.
C'est donc dans cet état d'esprit que j'ai regardé Edge of Tomorrow, avec en ligne de mire les critiques et la notation globale, plutôt positives en général.
Premier constat, c'est assez marrant, avec un côté humour décalé très sympa et assez frais. Pile poil pour contrebalancer un scénario qui pourrait succomber à ses excès de déjà vu ou à une lourdeur prévisible. Sans avoir vu l'oeuvre originale de Hiroshi Sakurazaka, je ne peux donc que constater la relative banalité de la trame et sa haute teneur en SF de base: Extraterrestres über puissants, mais l'humanité vouée à sa perte va voir une lueur d'espoir avec l'avènement d'un pauvre couillon détenteur d'une possibilité de victoire improbable mais sur un malentendu il se pourrait qu'éventuellement ça fonctionne...
Bref, c'était pas gagné d'avance... Dans tous les cas. Autant pour notre héros que pour mon intérêt. Pourtant on sent dans les répliques et dans le jeu des acteurs une bonne humeur communicative, un petit je ne sais quoi de différent qui vous décrispe dès le départ. Je me plaît à penser que c'est grâce à une réalisation impeccable et à de somptueux effets spéciaux, mais je prendrais trop de risques, car c'est plutôt subjectif. J'ai apprécié en tout cas la sortie de la grosse artillerie côté réalisation, autant que les répliques, qui sautillent justement entre grosses blagues qui tâchent et petites blagounettes raffinées à l'Anglaise, bien balancées et souvent dans l'auto-dérision.
On obtient donc un mélange franchement savoureux et bien rythmé dans l'ensemble, même si on sent de lourds compromis dans certaines scènes plus axées sur un romantisme un peu mielleux et quelques petites lourdeurs scénaristiques avec un point "mission impossible" toutes les dix minutes. (La ménagère de moins de trente cinq ans, faut pas déconner)
Je regrette aussi l'inutilité des seconds rôles, intéressants pour l'humour mais bricolés sur la fin.
Donc au final, même si ce film n'apporte pas grand chose de plus qu'un excellent divertissement, il rentre d'emblée dans ma liste de films "plaisirs coupable", car j'y retrouve un humour varié ainsi que plusieurs acteurs jouant avec leur image à la perfection, à l'instar d'un Bill Paxton ou d'une Emily Blunt à fond dans leur rôles et dans les contrastes de leurs personnages.
C'est rythmé, c'est marrant et ça passe, même pour tout le monde. Notre casual spectateur est sauf, tout va bien.
À noter pour finir que oui, un film avec un Tom Cruise marrant et décalé qui sauve le monde (sans les tics d'acteurs) c'est encore possible sans avoir honte pour lui.
(Youpi)