Cucurrucucuuuuuuuuuuuuuu

Kirk Douglas qui pousse la chansonnette en espagnol, c'est collector : https://www.youtube.com/watch?v=-Q9gQuQ7uTE

Un peu déstabilisé par le contenu du film, qui relègue le western et ses codes en l'arrière plan (ou presque) pour se concentrer sur des thématiques finalement propres au mélodrame pur jus. Je ne connais pas du tout le cinéma de Robert Aldrich, mais indépendamment de mon non-attrait pour ce registre mélodramatique-là, il me semble que le traitement est loin d'être mauvais.

Beaucoup de thèmes chers aux westerns les plus traditionnels sont là, de la transhumance d'un important troupeau de vaches aux chasses à l'homme croisées, et pourtant ce sont deux personnages féminins, une mère et sa fille, qui cristalliseront les principaux enjeux. Une très bonne tirade illustre assez bien leur rôle ici : "Men kill or get killed and women bury them. We're professional survivors". Deux belles figures de pionnières, de femmes fortes qui se ménagent leurs zones de liberté quand le duo masculin Douglas / Hudson ne sont pas dans les parages. Autant Kirk Douglas gère très bien son personnage (un peu moins charismatique que d'habitude, mais tout de même, son costume noir moulant vaut le détour) dans ses aléas émotionnels, autant Rock Hudson fait vraiment figure de bœuf impavide à côté. Un mollusque face au caractère pétillant et au lyrisme un brin forcé de son partenaire masculin, sautillant ci et là, antihéros extraverti maniant autant le chant (on n'en peut plus du Cucurrucucu à la toute fin) que la poésie.

C'est le côté tragique, à partir du moment où une certaine relation de parenté est éventée sous forme de révélation tonitruante, qui ne fonctionne pas vraiment pour moi, laissant derrière cela une dernière demi-heure extrêmement longue. La réflexion sur l'amour sous toutes ses formes, conjugal, amical, adultère ou filial est plutôt bien menée et flirte assez agréablement avec le scandale (l'âge d'abord, puis l'inceste, annoncé de manière assez brutale suite à un baiser vigoureux). Quelques accès inattendus, comme ce moment où Kirk manque de tuer un chien à mains nues, achèvent de conférer à ce "El Perdido" (encore une grosse rigolade en termes de traduction) un cachet certain, un ton très original, sans pour autant me convaincre parfaitement : trop de passages ouvertement naïfs, quelques décors en studio plutôt moches, et au final une grande quantité d'arcs narratifs parasites inutiles.

[AB #169]