Avec le décès de ce géant du cinéma qu'est Robert Redford, plusieurs des œuvres dans lesquelles il a joué ou bien qu'il a réalisé passent à nouveau sur le petit écran.
Ce fût donc le cas de Et au milieu coule une rivière. Sorti en 1992, il n'a pas pris une ride dans l'eau de sa pureté. Film contemplatif, il offre le panorama de la vie d'un fils de pasteur rigoriste (interprété fort justement par Tom Skeritt).
Depuis sa prime jeunesse, insouciante aux côtés de son jeune frère turbulent malgré une éducation rigoureuse, jusqu'à son dernier âge, Norman traversera l'existence avec des joies immenses et des peines tout aussi intenses.
Incarné par Craig Sheffer (et Joseph Gordon-Levitt lorsqu'il est enfant), cet être raisonnable marche dans les traces de son père tout en tâchant d'entretenir des relations fraternelles avec son frère, campé par un excellent Brad Pitt, qui fait montre d'un sacré caractère dès son plus jeune âge. Au terme d'une vie relativement courte et tumultueuse, il disparaît tragiquement, terrassant de douleur ses parents et son frère (la mère est jouée par Brenda Blethyn avec une belle intensité intérieure).
Il est ici question d'amour fraternel mais aussi et surtout de transmission. Des valeurs tout d'abord, issues de la figure paternelle, empreintes de religion, mais aussi de passion pour la nature au travers de la pêche aux truites arc-en-ciel. Un pasteur grand pêcheur devant l'Eternel, voici qui ne manque pas de sel. Les images sont posées, calmes, à l'instar de cette nature sauvage qui témoigne de la beauté de la création pour ces êtres de foi. Si le film est pour une bonne partie contemplatif, il apporte également son lot d'émotions fortes au travers des relations humaines, qu'elles soient amoureuses ou familiales. "Pourquoi ne peut-on pas aider ceux qui en ont le plus besoin ?" demande éplorée la petite amie de Norman à celui-ci. Tout comme son père lors de son ultime sermon à l'église, le fils ne saura pas apporter de réponse. Même si l'on ne comprend pas ses proches, on peut tenter de les aimer inconditionnellement.
Film d'une apparente simplicité, il aborde des questions fondamentales sur la nature de l'homme, de ses relations avec ses pairs et la nature qui l'entoure. Inutile de trop intellectualiser cette œuvre, il faut tâcher de la ressentir, parvenir à s'immerger dans le lit de la rivière pour entendre, peut-être, un jour, la parole divine.